C’était il y a cent ans… en mai 1912
19 mai 2012 - TsiahyNo Comment   //   1744 Views   //   N°: 28

Les élégantes se sont donné rendez-vous aux courses le dimanche 5 mai, première date d’une saison organisée par la Société d’encouragement pour l’amélioration des races de chevaux à Madagascar, et qui prévoit quatre réunions jusqu’à décembre. Les parieurs étaient là aussi, avec parfois quelques surprises.

Dans la deuxième course, Digy et Gigot, les grands favoris, ont été battus par Noé, le cheval du Dr Rajoelina dont l’écurie a rapporté 42,50 francs à ceux qui avaient pronostiqué sa victoire. Course agitée, d’ailleurs, puisque Gladiateur a fait une chute et que le jockey de Dify a été accusé d’avoir gêné un autre cheval. Course agitée ou truquée ?

Le bruit court, à travers la ville, que le gouverneur Albert Picquié aurait été le principal bénéficiaire des paris.

Un autre sport, à défaut d’être accessible à tous, suscite un grand intérêt : l’aviation, dont il était question le mois dernier. Le samedi 11 mai, le champ d’aviation d’Androhibe accueillait l’aviateur Raoult et « une grande affluence de monde ».

Il n’avait plus volé depuis le 7 juillet 1911, et l’appareil avait ensuite dû être réparé. Cette fois, Raoult a décollé à la troisième tentative mais, après s’être élevé d’une dizaine de mètres, le pilote a perdu le contrôle, a touché terre avec une aile et a capoté.

Au grand soulagement de la foule, l’aviateur s’en est sorti avec quelques contusions. Et un journaliste de conclure : « En présence de ces essais infructueux, le choix d’un champ plus vaste que celui d’Androhibe s’impose si l’on persiste à continuer les expériences d’un sport qui nous coûte fort cher et dont le but utilitaire à Madagascar nous échappe encore. »

Malgré ces doutes, la souscription ouverte pour l’aviation française a recueilli, à la fin du mois de mai, près de 5 000 francs. Pour quand, le canal des Pangalanes ? Les colons de la côte Est s’inquiètent du retard pris dans les travaux de percement du canal des Pangalanes, sur lequel ils comptent beaucoup.

Un crédit de 500 000 francs a été inscrit au plan de campagne des Travaux publics pour l’aménagement en 1912 de cette voie fluviale. Mais cette somme a été réduite, sans publicité, à 350 000 francs, et les adjudications tardent à être approuvées. Si bien que, prédit un habitant d’Ambodiroa, près de Vatomandry, « on nous fera, en 1912, 50 000 francs de travaux ! »

Du côté d’Ambositra, le service automobile prolongé en avril vers Fianarantsoa et Mananjary est si efficace qu’en comparaison, les voitures venant de Tananarive semblent tout à coup bien lentes. Pourquoi faut-il six heures et demie pour couvrir les 150 kilomètres de Fianarantsoa à Ambositra alors qu’il faut dix heures entre Tananarive et Antsirabe (160 km), puis une demi-journée pour les 94 kilomètres supplémentaires jusqu’à Ambositra ? Communiquer grâce à la télégraphie sans fil évite bien des déplacements.

D’ambitieux projets foisonnent pour les colonies françaises. À Madagascar, trois stations sont en fonctionnement, d’une portée moyenne de 800 kilomètres. Elles mettent en communication Dzaoudzi, Majunga et Diégo-Suarez. Complétées par une ligne télégraphique entre Tananarive et Majunga, lieu d’atterrissement du câble qui relie la colonie à la métropole.

Celui posé entre Madagascar et la Réunion étant très coûteux à entretenir, il devrait être remplacé par la télégraphie sans fil à partir de Diégo-Suarez. Au courrier, la rage… Le courrier, parfois porteur de mauvaises nouvelles, a récemment transporté quelque chose de plus inquiétant encore : une cervelle de chien enragé a souillé le sac postal d’Andevoranto, et toutes les personnes de Tananarive qui auraient reçu des lettres de cette provenance le 22 mai sont invitées à se présenter au Receveur des Postes, place Colbert.

Le professeur Lacroix poursuit son oeuvre de minéralogiste par ses cours des mercredi et vendredi à la Galerie de Minéralogie. Il y expose les résultats de sa mission dans les Colonies françaises de l’océan Indien, complétant ainsi son cours du lundi sur la structure et la composition des roches éruptives. Le Comité de Madagascar de l’Alliance française fait sa promotion.

Forte de 50 000 adhérents dans le monde, l’Alliance française se propose « de propager la langue française dans les Colonies et à l’étranger afin d’étendre nos relations commerciales et de conquérir pacifiquement les indigènes » et « d’entrer en relation avec les groupes de Français établis à l’étranger, afin de maintenir parmi eux le culte de la langue nationale ; avec tous les amis de la langue et de la littérature françaises. »

La cotisation est fixée à 6 francs par an.

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