Sens plastique
14 novembre 2014 - PortfolioNo Comment   //   2282 Views   //   N°: 58

Jery, la ligne pure du métal

par #SophieBazin

Quand on demande à Jery ce qui anime sa création, il évoque les formes rondes des petits zébus de son enfance, façonnés dans la glaise, la liberté des courbes animales et végétales, et aussi un désir constant de s’élever, par des sculptures ancrées dans le sol qui s’élancent vers le ciel avec légèreté.

La sobriété de ses tôles d’acier, martelées et soudées, fait regretter par certains l’absence de couleur mais la recherche sur la forme est suffisamment approfondie pour se suffire à elle-même et il s’agit bien d’art, non de décoration.

Jery expose avec parcimonie, tous les deux ans, mais il accueille avec plaisir les amateurs dans son atelier d’Alasora, lequel lui permet de vivre de sa création.

En 1995, il rencontre celui qui deviendra son maître, Luc Michez, un artiste belge sculpteur, dessinateur et réalisateur. Michez l’accueille chez lui et le fait dessiner, juste dessiner, pendant quatre ans, avec une exigence constante pour la pureté des lignes.

Des stages de design, notamment au Cenam, compléteront sa formation, et il puise ensuite dans les livres : Miro, Bottero, Calder ou Brancusi deviennent ses références.

Jery commence ses expérimentations sur le volume avec la corde, le bois, l’os et le papier mâché. Aujourd’hui il se consacre à l’acier et au granit avec, aussi, des envies de bronze.

Son art l’emmène à l’étranger, au Canada, à la biennale de Dakar, en France chez Vladimir Skoda, et il enrichit son répertoire avec toutes les formes qui se présentent à lui, réutilisant les lignes dans une création qu’il définit comme abstraite ou semi-abstraite, en tout cas très loin du réalisme académique

Pourtant quand on lui parle d’art contemporain, Jery ne cache pas son scepticisme.

Autodidacte, il se retranche sagement derrière l’avis des experts pour définir son travail, mais les installations, le land-art, les œuvres conceptuelles n’ont, selon lui, pas grand rapport avec sa recherche de la ligne pure, et l’exposition concomitante (notamment à Dakar) d’œuvres de natures si différentes peut s’avérer source de malentendus.

Qu’elles soient d’inspiration animale ou ethnique, les sculptures de Jery font vibrer l’espace de leur présence discrète ou monumentale. Rien d’étonnant quand on sait qu’elles ont vu le jour à Alasora, là où le roi Andriamanelo fut le premier dans l’histoire de l’Imerina à fabriquer le « fer volant ».

Alice Aucuit, la poésie dans l’assiette

De l’autre côté de la mer, la « plasticienne à tendance céramiste » Alice Aucuit s’évertue à mettre de la fraîcheur dans le quotidien. Qu’elles soient utiles (O’grès d’Alice) ou plus conceptuelles, ses œuvres ouvrent un dialogue entre l’homme et son histoire, en n’oubliant jamais d’y glisser un brin d’ironie. Intégrant l’écriture aussi bien que les reliques, ses installations s’inscrivent comme des réactions épidermiques, évoquant ce qui choque, et ce qui se brise : ainsi ces tentes igloos de porcelaine, inspirées par l’histoire des sans-abri, qu’Alice installa dans les rues parisiennes durant la Nuit des Musées. Un geste fort pour sortir l’art de l’institution et lui redonner sa bonne place : au cœur de la vie.

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