3MA : La kora, l’oud et la valiha
3 septembre 2018 - CulturesNo Comment   //   1749 Views   //   N°: 104

Le Malien Ballaké Sissoko, le Marocain Driss El Maloumi et le Malgache Rajery forment les 3MA. Un trialogue entre trois instruments à cordes pincées, la kora, l’oud et la valiha pour une proposition musicale inédite. Ils sont en ce moment en tournée mondiale pour promouvoir leur deuxième album « Anarouz ».

De la musique du monde ? Non, les 3MA préfèrent créer la musique de leur monde. Un monde ensoleillé par une résonance poétique de trois instruments traditionnels à cordes pincées. Trois virtuoses complices du MAli, du MAroc et de MAdagascar d’où 3MA. Le malien Ballaké Sissoko appelé maître de la kora (harpe-luth mandingue), le marocain Driss El Maloumi surnommé l’enchanteur du oud (luth arabe) et Rajery nommé prince de la valiha (cithare tubulaire) forment les 3MA depuis 2006. Leur dénominateur commun ? Le sang africain coule dans leurs veines et ils sont tous les trois des instrumentistes contemporains d’exception. « Je suis fier de mon instrument : cette harpe-luth à 21 cordes qu’on appelle la Kora. C’est mon héritage familial et elle représente le symbole artistique de mon pays le Mali », confie Ballaké Sissoko.

Leur répertoire mêle sonorité mandingue de l’Afrique de l’Ouest et musique marocaine berbère avec une touche de musique contemporaine malgache et quelques notes de jazz. « Il n’y a pas de nom pour qualifier notre musique. C’est la synthèse entre les affluents musicaux de nos trois pays. En bref, une nouvelle proposition artistique et musicale. D’ailleurs, j’ai toujours rêvé de cette fusion entre les trois instruments traditionnels dont la kora, l’oud et la valiha », confie Rajery.

C’est dans un hall d’hôtel à Agadir que Driss El Maloumi et Rajery se rencontrent en 2006 dans le cadre du festival Timitar au Maroc. « Nous avons joué quelques notes ensemble. Ça a été le déclic, il fallait qu’on aille plus loin », se rappelle Driss El Maloumi. Si le désir de travailler ensemble a été bel et bien là, le trio a été créé sous l’impulsion du Centre culturel Albert Camus (CCAC), l’actuel Institut français de Madagascar (IFM). Trois résidences de création ont été organisées en 2007, dont deux au CCAC et une à La Réunion. « Pour qu’un trio marche, il faut du travail. La force des 3 MA réside dans leur complicité aussi bien artistique qu’humaine. C’est un vrai travail collectif. Ils écrivent et font les arrangements à trois en s’accordant du temps pour les échanges et les partages. On sent à travers 3MA ce désir de créer une œuvre originale et unique à travers trois cultures différentes », confie Bérénice Gulmann, ancienne directrice du CCAC.

Les trois virtuoses sont engagés dans la promotion de l’art et de la culture de leur pays. Equipés de leurs expériences artistiques et humaines, ils mettent chacune de leur personnalité dans 3MA. Driss El Maloumi a été formé aux musiques classiques arabes et occidentales. Ballaké Sissoko est membre-fondateur de l’Ensemble instrumental du Mali. Quant à Rajery, il a obtenu le Prix Musiques RFI en 2002. Il a créé le festival des musiques vivantes Angaredona et a une association qui agit en faveur de l’éducation, de la musicothérapie et de la reforestation.

De temps à autres, les 3MA participent au projet musical Route de l’esclavage du grand chef d’orchestre espagnol Jordi Savall. Près de 400 années d’histoire de l’esclavage racontée en musique. « A travers ce projet, Jordi Savall démontre que l’esclavage existe toujours bel et bien mais sous d’autres formes. Avec son orchestre, il veut briser le silence par le biais de la musique des mondes. C’est normal si on s’implique dans ce projet, l’esclavage est considéré comme un crime contre l’humanité », explique Rajery.

Ils ont sorti leur premier album 3MA de 11 titres avec le label Belge Contre Jour en 2008, qui a obtenu le premier prix lors du World Music Charts Europ la même année. Une dizaine d’années après, leur second album Anarouz (Espoir) avec 10 titres, produit par Mad Minute Music, est sorti en 2017. « Les trois pays, Madagascar, Maroc, Mali, ont tous les trois de graves problèmes (politique, économique, social, environnement, etc.). Nos conditions de vie se dégradent de jour en jour. Mais si tout le monde perd espoir, qu’est-ce qu’il reste ? Il faut toujours avoir de l’espoir et avancer », confie Rajery. Un message d’espoir envoyé à travers des sonorités à la fois douces et vivifiantes. Certains médias internationaux qualifient Anarouz de dialogue virtuose et bienheureux.

Les 3MA sont en tournée depuis novembre 2017. Ils sillonnent les salles et les festivals, en partant de Madagascar pour aller en Afrique, en Europe jusqu’en Amérique du Sud et aux Etats Unis. Avec plus d’une cinquantaine de concerts prévus, les 3MA se sont produits dans des grands festivals comme le Songlines Encounters Festival en Grande Bretagne (mai), le Festival musiques métisses à Angoulême en France (juin), et sera au Festival d’Ambronay en France (septembre). Si vous passez par là…

© photo : Cyrille Choupas

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