Madame Dedamas : Reine non-conformiste
7 juin 2025 // Arts de la scène // 2341 vues // Nc : 185

Sous ses perruques flamboyantes et son eyeliner dramatique, Madame Dedamas ne se contente pas d’enfiler des habits de scène : elle incarne une figure totale, un personnage de théâtre queer aux mille reflets. À Antananarivo, cette dragqueen malgache façonne une œuvre à part entière, entre mode, chant, performance et résistance joyeuse.

Talons vertigineux, corset façon Botticelli remixé par Lady Gaga, avec un maquillage plus baroque que discret et perruque comme un clin d’œil lourd de sequins à Cher. A Tana, chaque apparition sur scène de ce personnage haut en couleur devient un événement. On le connaît sous le nom de Madame Dedamas. Elle performe mode, théâtre, chant, danse, subversion. Sur scène, rien n’est laissé au hasard : le flirt, le burlesque, les chansons torrides et les ballades pleines de spleen forment un mélange aussi électrique que raffiné.

« Avec de solides backgrounds en comédie musicale, j’interprète des standards de Broadway. Je fais également du lip-sync, du voguying en guise de clin d’œil aux icônes queer. Je prévoie aussi tenter un reveal, comme Sasha Velour qui avait planqué des pétales de rose partout sur elle. Ce genre de surprise, ça vous arrache une larme en plein strass », lance-t-elle, non sans fierté.

Il y a encore deux ans, personne ne connaissait Madame Dedamas. Quand on lui demande d’où vient ce personnage qui marque tant les esprits aujourd’hui, elle ressort instantanément ce propos de RuPaul Charles, qui dit « On naît nu.e.s, le reste, c’est du drag. » Cette phrase fut une épiphanie, un déclic, pour Madame Dedamas. « C’était il y a deux ans, devant un écran où s’affrontaient perruques et contourings survolés d’une ironie bien huilée », se rappelle-t-elle. Depuis, elle a troqué l’anonymat sage contre la flamboyance maîtrisée : s’habiller, oui, mais comme on prend un rôle à bras-le-corps.

Quant à son nom, ce n’est pas tombé du ciel. La rose de Damas, fleur capiteuse et ténébreuse, évoque ce goût affirmé pour le gothique grotesque, un théâtre des excès où le ridicule tutoie le sublime. Et cette particule aristocratique, c’est le clin d’œil assumé à une certaine idée du glamour français, celui qui flirte avec le kitsch sans pour autant tomber dedans. Le style de Madame Dedamas ? « Inclassable », répond-elle sobrement. Elle le réinvente à chaque show, pioche ici dans l’élégance lugubre de Morticia Addams, là dans le cabotinage des méchantes de télénovelas, un jour en diva de Broadway, un autre en créature cyber des années 90.

Madame Dedamas se montre anticonformiste et provocatrice. « C’est elle qui me possède quand elle apparaît. Moi, je reste dans l’ombre. Dans une société comme la nôtre, qui griffe tout ce qui dépasse, l’anonymat, c’est un peu mon armure », confie-t-elle. En scène, elle devient une autre version de soi, plus féroce, plus libre : « Le drag, c’est un exutoire qui transgresse le genre. C’est comme si je m’autorisais à être la mère que je n’ai jamais eue, ou que j’aurais rêvé d’avoir. Une guide, une diva. »

Avec véhémence, elle se positionne comme porte étendard d’un réel mouvement. Elle veut faire chacun de ses spectacles une vraie bouffée d’oxygène, un rappel. En effet, elle connaît son histoire, celle du drag, des soulèvements de Stonewall à New York aux défilés de Pride devenus des rituels de résistance. Elle n’oublie rien. « Je suis admirative des militant.e.s qui s’exposent et qui portent des causes à bout de bras. Moi, j’ai choisi l’euphorie comme arme. Créer un espace de fête, c’est déjà une réponse politique. Mon drag est une bulle de joie pour tous ceux que le monde blesse ». Et ce refuge, il est vital.

Mpihary Razafindrabezandrina

Instagram : madame_dedamas

Laisser un commentaire
no comment
no comment - Paskero sort "C'est la bella vita"

Lire

7 septembre 2025

Paskero sort "C'est la bella vita"

Le chanteur français Paskero a annoncé ce 5 septembre la sortie de son clip « C'est la Bella Vita » chantant son amour pour Madagascar, qu'il interprè...

Edito
no comment - A moitié... mais plein

Lire le magazine

A moitié... mais plein

Madagascar, éreintée par les mauvaises nouvelles ? Eh bien, rien n’arrête désormais notre île-horizon. À force de scruter le verre à moitié vide, on a fini par rater le somptueux punch qui le remplit. Pourtant, il déborde joyeusement.Prenez la culture ! KVNTO, un chanteur de Toamasina rejoint l’album d’un monde qui parle plus de 200 langues (réellement ! pas juste un tour de Babel gadget). Mika Kely brille aux États-Unis, Betia en Europe, tandis que nos stylistes, écrivains et chefs VIP raflent des prix sur les cinq continents. Peut-être que Jaojoby, roi du salegy, ou le groupe Tarika, adulé jusqu’à Time « 10 best bands on planet Earth » nous avaient déjà avertis qu’on pouvait sortir la tête (et les talons).Côté technologies et sport, nos talents raflent médailles et trophées. Jiu-jitsu, pétanque jusqu’au championnat en robotique… nos compatriotes font parler – en bien – de la Grande-île. Pour ce qui est des relations internationales – surtout en matière de développement économique - Madagascar a accueilli au mois d’août le 45ᵉ sommet de la SADC et s’est également positionné comme partenaire-clé au TICAD19 Japon, avec création d’une Chambre de commerce nippo-malgache. Voilà ce qu’on appelle être tellement en lumière qu’on brûle un peu nos lunettes pessimistes.Oui, les problèmes persistent. Mais à NoComment, on choisit de braquer le projecteur sur ce qui marche. Pour cueillir ces pépites, il faut parfois arrêter d’écouter les mauvaises ondes. Alors oui, le pays est à moitié... plein. Et on va continuer à le dire, haut et clair.

No comment Tv

Making of shooting mode – AOÛT 2025 – NC 187

Retrouvez le making of shooting mode du 𝗻𝗼 𝗰𝗼𝗺𝗺𝗲𝗻𝘁® magazine, édition août 2025 - NC 187.Prise de vue : Ankaditany Ampitatafika 
Collaborations : Tanossi  – Via Milano mg  – HAYA Madagascar  - Akomba Garment MG - Carambole 
Make up : Réalisé par Samchia 
Modèles : Fitahiana, Mitia, Nolan, Ulrich, Mendrika, Odyah, Johanne, Stevie, Santien, Mampionona 
Photos : Andriamparany Ranaivozanany 

Focus

MOOR1NG

MOOR1NG au Palais des Sports Mahamasina

no comment - MOOR1NG

Voir