Chaminna Myria Sakina, plus connue sous son surnom affectif Chacha, dirige Godié Hype Hope depuis 2019. Son festival hip-hop grandit d'année en année, fédérant jeunes artistes et familles autour des cultures urbaines. Objectif 2024 : faire rayonner Antsiranana sur toute la région Nord.
Godie Hype Hope Festival est à sa quatrième édition, cette année…
Depuis la création de Godié Hype Hope en 2019, mon ambition a toujours été de donner une véritable scène aux danseurs, en rassemblant artistes et passionnés autour d’une même vision : célébrer la richesse et l’impact du hip-hop. Dès la première édition, nous avons fait en sorte que ce festival soit plus qu’un simple spectacle : une communauté, une plateforme d’échange, un espace où les jeunes trouvent à la fois inspiration, formation et opportunité d’expression. Cette dimension de transmission a été essentielle pour inscrire l’événement dans la durée. Godié Hype Hope s’est enraciné à Antsiranana grâce à une approche à la fois artistique, éducative et communautaire. Et, au fil des éditions, Godié Hype hope a fédéré un public toujours plus large — danseurs, musiciens, Rappeurs, mais aussi familles, scolaires, et institutions locales — faisant de lui un rendez-vous attendu dans le calendrier culturel de la région. Sa résonance a dépassé Antsiranana, en attirant des artistes et partenaires venus d’autres régions de Madagascar, mais aussi de la zone Océan Indien et de l’international.
Comment décririez-vous l’état des lieux du hip-hop à Antsiranana aujourd’hui ?
Antsiranana est une ville en plein essor, dotée d’une scène artistique dynamique et d’un potentiel culturel immense. Elle bénéficie d’une grande diversité culturelle et d’une jeunesse créative et passionnée qui s’approprie les tendances artistiques mondiales, notamment le hip-hop. Ici, les acteurs sont principalement des danseurs, des collectifs de jeunes artistes et des associations locales. Ce qui caractérise la scène d’ici, ce sont ses influences locales : la musique, l’énergie des cultures urbaines de la ville, et un esprit de convivialité et de solidarité. Ici, le talent ne manque pas : la jeunesse est passionnée, inventive et avide de danser, de créer et de partager. Mais les obstacles restent importants, notamment à cause de l’état pitoyable de la route nationale et les frais de transport élevés rendant l’accès à la ville difficile. Tout ça limite les échanges entre artistes et leur visibilité sur la scène nationale. Ce n’est pas le manque d’énergie ni de créativité qui freine le développement, mais l’absence de structures solides, d’espaces adaptés et d’opportunités d’échanges.
Que nous réserve cette édition sur le plan artistique ?
Cette 4ᵉ édition, baptisée 4ever Edition, se veut à la fois ambitieuse et fédératrice. Contrairement à la précédente, centrée sur les quartiers, cette année le festival s’installe à l’hotel de ville d’antsiranana sous le concept de « Village urbain », pour créer une véritable immersion culturelle et artistique. L’inclusion est au cœur de cette édition : nous voulons que les femmes, les enfants et les personnes qui n’ont pas toujours accès à la culture puissent trouver leur place. Le festival devient un espace de découverte, de transmission et de partage intergénérationnel. L’une des grandes nouveautés est l’ouverture nationale : au-delà d’Antsiranana, le festival accueillera des participants venus de toute la région Nord de Madagascar – DIANA, SAVA, Sofia et Boeny. Cette année, le public aura droit à des battles, des workshops et aussi des conférences, tables rondes et masterclasses animés par des chorégraphes confirmés. Nous avons aussi mis en place une boutique culturelle immersive, un village urbain et programmé une parade artistique.
A part le côté culturel, quels objectifs poursuivez-vous avec ce festival ?
Godié Hype Hope est bien plus qu’une vitrine de talents. Notre objectif est d’en faire un outil de formation, de transmission et d’émancipation pour la jeunesse. Le festival offre aux jeunes artistes un espace pour apprendre, s’exprimer et se professionnaliser à travers des workshops, masterclasses et échanges avec des intervenants expérimentés. Il s’agit aussi de favoriser l’accès à la culture pour tous, y compris pour les jeunes défavorisés ou éloignés des pratiques artistiques. En créant des espaces d’expression et des actions éducatives, nous voulons contribuer à renforcer le lien social et l’égalité des chances. Au-delà de l’aspect artistique, le festival porte une véritable dimension citoyenne : il valorise la créativité comme un moteur de développement personnel, encourage l’inclusion et montre que la culture peut être un levier d’opportunités, d’identité et d’avenir.
Comment voyez-vous l’évolution du Godie Hype Hope Festival dans les prochaines années ?
Nous voyons Godié Hype Hope évoluer comme une plateforme de référence pour le hip-hop, d’abord à Madagascar, puis dans l’ensemble de l’océan Indien. Chaque édition renforce notre réseau d’artistes, de partenaires et de publics, et nous permet de professionnaliser davantage la scène urbaine locale. À court terme, nous souhaitons consolider les liens avec les régions du Nord et étendre notre tournée de sélection pour inclure encore plus de jeunes talents. À moyen et long terme, nous voulons créer un carrefour régional, où les artistes de Madagascar, des Comores, de Maurice, des Seychelles ou encore de l’Afrique de l’Est pourront se rencontrer, échanger et collaborer. L’objectif est que le festival devienne un véritable tremplin, un espace où la formation, la création et la diffusion se conjuguent, tout en restant profondément ancré dans les valeurs du hip-hop : paix, unité, expression et inclusion. Nous ambitionnons que Godié Hype Hope inspire non seulement les artistes, mais aussi la jeunesse, et qu’il contribue à faire rayonner la culture urbaine malgache à l’international.
Propos recueillis par Solofo Ranaivo