L’Homme et l’Environnement « Madagascar perd 100 000 hectares de forêts par an »
18 novembre 2023 // Nature // 3453 vues // Nc : 166

Œuvrant depuis 30 ans à Madagascar, l’ONG L’Homme et l’Environnement s’est donné pour mission de sauver des écosystèmes particulièrement riches et fragiles grâce à une approche holistique qui conjugue conservation de la biodiversité et développement des communautés locales. Son fondateur, Olivier Behra, nous explique qu’aujourd’hui cinq sites d’intérêt majeurs ont pu être préservés sur la Grande Île. Parmi eux, la réserve de biodiversité de Vohimana, 1500 ha, dont 750 hectares de forêts naturelles en cours de classement en aire protégée.

Le Relais du Naturaliste de Vohimana.

Pourquoi L’Homme et l’Environnement à Madagascar ?
En 1993, date de création de l’ONG, face à un niveau de déforestation alarmant et croissant, j’ai réuni une équipe pluridisciplinaire de plus de vingt chercheurs, de la biologie à l'anthropologie en passant par l'économie pour essayer d’en comprendre les causes et mécanismes. Le constat était clair, pour conserver ces forêts, il y avait l’opportunité d'agir en valorisant les ressources naturelles pour parvenir à impliquer les communautés locales dans la préservation de leur patrimoine.

Quels sont vos axes d’action et comment mesurez-vous votre impact ?
Les actions se concentrent sur l’amélioration des conditions de vie locales sans compromettre la biodiversité. Des initiatives comme la valorisation des plantes aromatiques et médicinales, une agriculture respectueuse, l’éducation, la santé et la protection des forêts sont mises en place. Plusieurs centaines de villageois bénéficient des programmes, ce qui démontre un impact concret. L'objectif est de renforcer la capacité de gestion des associations et groupements locaux pour aboutir à un programme autonome en 2030.

Pourquoi le site de Vohimana a-t-il focalisé votre intérêt ?
En 2000, Vohimana, situé au cœur du corridor forestier à l’Est de Madagascar, s’est imposée comme le terrain idéal pour appliquer les stratégies inédites de conservation et de développement durable de l’ONG. D’une richesse en biodiversité inouï, la forêt de Vohimana était alors vouée à disparaître dans les cinq prochaines années si rien n’avait été fait.

Vohimana est reconnu comme abritant l’une des biodiversités les plus riches de la planète avec notamment une diversité en amphibiens unique sur le plan mondial, mais aussi 12 espèces de lémuriens dont le rare Allocebus trichotis, et finalement pas moins de 20% de l'ensemble des espèces de vertébrés supérieurs de Madagascar sur 100.000 fois moins de surface que l’ensemble du territoire.

Sans oublier l’immense richesse floristique de plus de 800 espèces, dont de très nombreuses orchidées, palmiers endémiques et 160 plantes reconnues pour leurs propriétés médicinales.

L'objectif est maintenant de classer officiellement la zone en aire protégée de catégorie VI qui inclut préservation de la biodiversité et développement humain. Nous attendons avec impatience le décret de classement temporaire de la part des autorités.

Alambic de Vohimana
Mantella baroni
© photo : Frank Deschandol

Comment arriver à impliquer les communautés locales dans la préservation de la biodiversité ?L’utilisation des huiles essentielles a été une stratégie forte. Des alambics ont été amenés dans la brousse pour que la production se fasse directement sur place. La valorisation économique des plantes locales, comme le « mandrava sarotra », montre clairement le lien entre la conservation et les revenus locaux. Lorsque nous avons commencé à acheter les feuilles des arbres plantés en 2004 autour de la forêt de Vohimana, un paysan a dit : « si j’avais su, j’en aurais planté plus ». Maintenant les gens demandent à planter des arbres.

L’éco-tourisme constitue également un très fort levier d’implication. Proche de la capitale, Vohimana abrite le Relais du Naturaliste géré par une association locale. Qu’ils soient naturalistes ou à la recherche de calme et d’authenticité, nos visiteurs constituent une source de revenus tout au long de l’année pour la population locale qui perçoit alors tout l’intérêt de préserver leur patrimoine naturelle.

Et le rôle de la sensibilisation dans la préservation ?
La sensibilisation de nos visiteurs comme des communautés locales est essentielle à la conservation des écosystèmes. Il s’agit de comprendre ses enjeux au service d’un avenir meilleur pour tous les malgaches. 

Quelle suite pour vos activités ?
Les menaces persistent…et Madagascar perd toujours 100 000 hectares de forêts par an.
L’ONG poursuit ses activités, cherchant des fonds pour les sites de l’Ouest notamment. L’objectif ambitieux pour 2030, c’est d’éradiquer l’extrême pauvreté, accéder à la santé et à l’éducation, tout en préservant la biodiversité.

Propos recueillis par Mpihary Razafindrabezandrina
Contact : +33 6 07 69 73 38

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Il fut une époque où parler de « cinéma malgache » provoquait un sourire poli, celui qu’on réserve aux rêves un peu fous. D’autres se moquaient ouvertement de ces productions de niveau abécédaire. Désormais, ces points de vue moqueurs s’effacent pour laisser place à l’admiration. Les images sont plus nettes, les scénarios plus affûtés, les voix plus assurées. On sent cette montée en gamme, cette fierté tranquille d’un art qui prend enfin confiance en lui. Et c’est beau à voir — comme une pellicule qu’on aurait enfin sortie du grenier pour la projeter au grand jour.
Certes, des défis restent à relever, notamment en matière d’infrastructures, de financements, de formation… mais le vent tourne. Et ce vent-là sent la créativité, la sueur, et un peu de ce grain de folie propre à nos conteurs. La Grande-île ne veut plus être simple figurant dans l’histoire du septième art. Madagascar s’installe, doucement mais sûrement, dans le rôle principal. Au fond, ce renouveau n’est pas qu’un phénomène culturel. C’est une déclaration : ici aussi, on sait raconter. Et mieux encore, le faire rêver.

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