Tahina Carine : La nouvelle voix du Sud
1 juillet 2022 // Musique // 8743 vues // Nc : 150

Si elle a choisi de chanter le « talango », un style traditionnel du Sud, accompagnée de son « kabôsy » rustique, c’est qu’elle se sent profondément de ce monde-là. Elle veut être le porte-parole des gardiens de zébus et des ruraux de cette région du sud-ouest où elle a grandi.

Dans sa famille, la musique est une passion. Son père joue de la guitare, sa mère est chanteuse. Son premier public, ce sont les zébus dans les prairies de son village d’Ankilimida, dans la région du Menabe. Bien qu’elle soit née à Ambohimandroso, Tahina Carine a passé toute son enfance dans les campagnes du Menabe. « J’étais fascinée par ces gens qui venaient de la forêt pour venir chanter en plein milieu des marchés. J’étais tellement hypnotisée par leurs voix que j’en oubliais parfois d’aller à l’école ! » Elle est autant bercée par ces chants du Sud que par le folk malgache des années 1970 que ses parents écoutent en boucle. Plus tard, elle n’aura aucune difficulté à reprendre les chansons de Levelo, Lolo sy ny Tariny et Tselonina.

Mais finalement, c’est le répertoire traditionnel du Sud qui a sa préférence, notamment le talango qui signifie « voix mélodieuse » en antandroy. Elle excelle tout autant dans la guitare et le kabôsy, cette petite guitare rustique à quatre cordes qu’elle découvre en fréquentant les jeunes de son village. Son amour pour cet instrument grandit au point que son cousin lui en ramène un de Tana. Il lui apprend quelques bases et la jeune fille tombe sous le charme. « J’ai plus d’affinité avec le kabôsy qu’avec la guitare. Même si c’est assez difficile côté rythmique, il est plus facile quand on cherche des mélodies. » 

Se retrouvant au lycée à Tana, elle y découvre un autre univers et d’autres sons : les klaxons, les sirènes, les marchands ambulants, tous ces les bruits de la ville qui vont l’aider à se construire musicalement. C’est d’ailleurs grâce à l’autoradio du taxi-be qui l’emmène chaque jour au lycée qu’elle étoffe sa culture musicale. « Je découvrais de nouvelles chansons tous les jours et j’essayais de les reprendre à la maison. » Quelques années plus tard, elle monte sur scène pour la toute première fois avec Lolo sy ny Tariny, au Piment Café à Behoririka. Petit à petit, elle noue des relations avec de nombreux artistes. Mais à l’époque, se lancer dans une carrière professionnelle ne fait pas encore partie de ses projets.

Fin 2020, elle fait plusieurs rencontres qui vont changer la donne. D’abord avec le valihiste Rajery qui lui demande de participer au Caravane Rajery 2021 à Toliara. C’est à ce moment-là qu’elle découvre les musiciens qui l’accompagnent jusqu’à maintenant. « En fait, ce sont les musiciens de Rajery. Jerry, à la guitare, Lepa à la basse et Ratax à la batterie. Entre nous, le feeling s’est créé spontanément ! » Et comme le hasard fait bien les choses, elle croise également le guitariste Teta ainsi que la chanteuse Talike Gellé. « Je suis complètement fan de Talike, jamais je n’aurais pensé la croiser un jour ni même partager la scène avec elle… j’en ai pleuré. Elle représente vraiment le talango, cette voix mélodieuse du Sud (talango signifie « voix mélodieuse » en antandroy, NDLR) » La dernière rencontre déterminante sera celle de son manager, Anatole Ramaroson, président de l’association Vaovy, ancien journaliste reporter d’images et fondateur de Aye Aye Studio. « J’ai découvert Tahina Carine à travers une vidéo sur les réseaux sociaux avec une reprise de Lolo sy ny Tariny. Sa voix m’a séduite. Je lui ai proposé de trouver sa propre identité et de composer », explique Anatole Ramaroson. Depuis un an, ils préparent ensemble son premier album déjà baptisé Menabe, en hommage à cette région qui l’a vu grandir. Une dizaine de titres produits par Aye Aye Studio pour le label Talango Madagascar, dont le mixage se fait à Genève (Suisse). « Mon but est aussi de toucher l’international. Donc, il faut être capable de proposer un produit techniquement irréprochable, à la pointe du progrès.  Cela va dans le sens de ce que je fais, de la world music, un mélange de traditionnel et de très moderne. »


Aina Zo Raberanto

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Décembre arrive et, comme chaque année, Madagascar se réveille culturellement.
Soudainement, les salles de spectacle se remplissent, les artistes sortent du bois, les concerts s’enchaînent. C’est la saison des festivités de Noël mêlant sacré et profane, et des expositions de dernière minute. Bref, tout le monde s’active comme si l’année culturelle se jouait en un seul mois. Et franchement, il y a de quoi se poser des questions. On ne va pas se mentir : les artistes malgaches ne sont pas là uniquement pour nous divertir entre deux repas de fête. Ils bossent, ils créent, et à leur niveau, ils font tourner l’économie. Le secteur culturel et créatif représentait environ dix pour cent du PIB national et ferait vivre plus de deux millions de personnes. Pas mal pour un domaine qu’on considère encore trop souvent comme un simple passe-temps sympathique, non ?
Alors oui, ce bouillonnement de décembre fait plaisir. On apprécie ces moments où la création explose, où les talents se révèlent, où la culture devient enfin visible. Mais justement, pourquoi faut-il attendre décembre pour que cela se produise ? Pourquoi cette concentration frénétique sur quelques semaines, alors que les artistes travaillent toute l’année ? Des mouvements sont actuellement en gestation pour revendiquer leur statut d’acteurs économiques essentiels et pour que l’on accorde à nos créateurs une place réelle dans la machine économique du pays. La culture malgache vaut bien mieux qu’un feu d’artifice annuel. Elle mérite qu’on lui accorde l’attention qu’elle réclame douze mois sur douze.

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Photos : Andriamparany Ranaivozanany

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