La biennale de Nahampoana, une expérience entre orgasme esthétique, politique et patrimoine
19 avril 2025 // Arts Plastiques // 5242 vues // Nc : 183

La biennale de Nahampoana s’est déroulée au cœur de la réserve de Nahampoana, à quelques kilomètres de la ville de Fort Dauphin, du 22 au 23 février, sous l’impulsion de Noely Ratsimiebo, architecte, artiste et promotrice du tourisme dans la région Anosy. Pour les visiteurs qui étaient du rendez-vous, cela a été une expérience unique entre des œuvres d’une force phénoménale et des positions écologiques et patrimoniales sincères.

De l’art contemporain à l’appropriation de la nature
Imaginez vous promener au beau milieu d’une forêt, un matin pluvieux. Partout, cris d’oiseaux et lémuriens, froissement de feuilles, arbres immenses, du vert à n’en plus finir, et puis soudain une explosion de couleurs et de formes inouïes. Vous découvrez alors, dans cette masse presque étouffante de tropicalité, l’œuvre en rouge corail de Noely Ratsimiebo. Un entrelacs de branches aux allures de milliers de connexions neurologiques. Et quand on s’assoit en dessous, sur la chaise en bois d’on ne sait quel rafiot peinte de la même couleur, les plumes se balançant au bout de ce Nuage, comme Noely Ratsimiebo l’a intitulé, on est emporté.

Les enchevêtrements, le vent entre les fils qui dansent, nous entraînent dans un voyage qui pour l’artiste est un appel à la reconnexion, à s’approprier le lieu, la réserve, un patrimoine hors norme. Car il faut rappeler que la réserve de Nahampoana est dès le XVIIe siècle un lieu de rencontre des espèces végétales locales et étrangères. Un endroit historique qui met en lumière l’importance de Fort Dauphin pour le royaume de France d’alors qui envisageait d’en faire un grenier pour nourrir tout le territoire français.

Une biennale politique
Pour Noely Ratsimiebo, l’acte est dès lors politique. Car « L’art c’est politique », déclare-t-elle dès l’abord, dans un interview privé. En cela que cette biennale invite à s’émouvoir d’un patrimoine, c’est-à-dire d’un bien commun, et « dès que l’on parle de bien commun, c’est toujours politique, poursuit-elle ». En effet, selon l’artiste, le discours sur le territoire et son appropriation est trop pauvre à Madagascar.

« Sorti des airs protégés, il y a quoi ? Sorti des œuvres d’art, il y a quoi ? S’interroge-t-elle ». N’étant pas de ceux qui se tournent les pouces le ventre rongé d’angoisse, Noely Ratsimiebo a réuni autour d’elle des architectes et artistes comme Shama Boudhabhay et Sandrine Raveloson, dont l’engagement dans cette vision d’ensemble a porté le projet jusqu’à son terme.
Au final, c’est une biennale à la dimension des monuments d’art contemporain qu’elle expose, touchante, avec un message qui passe par l’esprit, fait frissonner la peau, et habite à jamais les cœurs.

Les critiques d'Elie Ramanankavana

Poète / Curateur d'Art / Critique d'art et de littérature/Journaliste.

Laisser un commentaire
no comment
no comment - Exposition : L’économie a bonne mémoire

Lire

10 octobre 2025

Exposition : L’économie a bonne mémoire

De l’époque des royaumes à l’ère républicaine, Madagascar raconte son parcours économique à travers une exposition inédite. Organisée par FTHM Consult...

Edito
no comment - Mada fait son cinéma

Lire le magazine

Mada fait son cinéma

Il fut un temps — pas si lointain — où le cinéma malgache était timide, réduit à quelques projections confidentielles et à des moyens de fortune. Depuis un certain temps – ironie du sort ou simple justice poétique – ce sont nos films qui s’invitent sur les écrans du monde et des festivals sur les cinq continents. Felana Rajaonarivelo, Kuro Mi qui ont été récemment primés dans des festivals internationaux. Avec cette nouvelle génération de cinéaste, Madagascar rafle les prix et, surtout, les regards.
Il fut une époque où parler de « cinéma malgache » provoquait un sourire poli, celui qu’on réserve aux rêves un peu fous. D’autres se moquaient ouvertement de ces productions de niveau abécédaire. Désormais, ces points de vue moqueurs s’effacent pour laisser place à l’admiration. Les images sont plus nettes, les scénarios plus affûtés, les voix plus assurées. On sent cette montée en gamme, cette fierté tranquille d’un art qui prend enfin confiance en lui. Et c’est beau à voir — comme une pellicule qu’on aurait enfin sortie du grenier pour la projeter au grand jour.
Certes, des défis restent à relever, notamment en matière d’infrastructures, de financements, de formation… mais le vent tourne. Et ce vent-là sent la créativité, la sueur, et un peu de ce grain de folie propre à nos conteurs. La Grande-île ne veut plus être simple figurant dans l’histoire du septième art. Madagascar s’installe, doucement mais sûrement, dans le rôle principal. Au fond, ce renouveau n’est pas qu’un phénomène culturel. C’est une déclaration : ici aussi, on sait raconter. Et mieux encore, le faire rêver.

No comment Tv

Interview - Mascha et Vincent Paquot Rasquinet - Octobre 2025 - NC 189

Découvrez 𝐌𝐚𝐬𝐜𝐡𝐚 et 𝐕𝐢𝐧𝐜𝐞𝐧𝐭 𝐏𝐚𝐪𝐮𝐨𝐭 𝐑𝐚𝐬𝐪𝐮𝐢𝐧𝐞𝐭, comédiens, dans le 𝐧𝐨 𝐜𝐨𝐦𝐦𝐞𝐧𝐭® NC 189 - octobre 2025. 
Au mois de septembre, les compagnies belges 𝐓𝐢𝐠𝐮𝐢𝐝𝐚𝐩 et 𝐅𝐓𝐋 𝐉𝐮𝐠𝐠𝐥𝐢𝐧𝐠 étaient de passage à Madagascar. Initialement venus dans la Grande île pour assister au mariage de leurs amis, les deux comédiens ont eu un agenda très chargé. Ils ont présenté – presque chaque jour – la pièce muette « 𝑰𝒅𝒚𝒍𝒍𝒆𝒔 𝒂𝒃𝒓𝒂𝒄𝒂𝒅𝒂𝒃𝒓𝒂𝒏𝒕𝒆𝒔 ».

Focus

Randonnée du CASM

Randonnée du Club des Amateurs de Scooters de Madagascar - CASM - à Behenjy, le 17 octobre.

no comment - Randonnée du CASM

Voir