Sandy Nirina : Portraits à contre-courant
21 septembre 2025 // Arts Plastiques // 2601 vues // Nc : 188

Einstein aux toilettes, Marilyn dans les bouchons, Mona Lisa au bord du lac Anosy… Dans l'univers d'Ep.Sandy.N, les icônes mondiales s'installent à Madagascar. Ce portraitiste autodidacte cultive l'art du détournement avec un pinceau malicieux et une technique affûtée.

Dans l’atelier d’Edmond Pierre Sandy Nirina, alias Ep.Sandy.N, tout semble possible. Une Mona Lisa, celle de Léonard de Vinci revisitée, pose à côté du lac Anosy sous le titre espiègle « Lisa à Tana ». Sur un autre mur, Marilyn Monroe, l’icône hollywoodienne immortalisée par Andy Warhol, s’emmêle dans les embouteillages d’Antananarivo. Et Albert Einstein fume sa pipe, pantalon baissé, assis sur un siège à l’anglaise, avec un sérieux pince-sans-rire qui force l’attention. Ici, le classicisme rencontre la pop culture, et chaque œuvre défie la gravité du quotidien. Les amateurs d’art parlent d’« essais osés », mais pour Sandy, c’est surtout une manière de s’amuser tout en explorant le portrait.

« Je peins à partir de photos. Qu’une image me plaise, c’est déjà une inspiration », explique-t-il. Portraitiste autodidacte, il a toujours été fasciné par le dessin et les grands noms de la peinture. Picasso, Léonard de Vinci, Michel-Ange… autant de références qui l’ont nourri dès son plus jeune âge. Mais ses premières œuvres destinées à la vente datent seulement d’il y a huit ans. « Le marché est complexe, et la rentabilité souvent aléatoire », reconnaît-il, avant de sourire et d’ajouter : « Mais pour moi, le vrai moteur, c’est le plaisir de créer et de se perfectionner. »

Pour Sandy Nirina, internet n’a pas seulement été une fenêtre sur le monde : c’était une école et un terrain d’expérimentation. Entre tutoriels vidéos, PDF de manuels anciens et échanges sur les forums, il a appris à manier pinceaux et aquarelles avec une patience de fourmi. « J’ai développé un goût pour les couleurs terreuses, le jaune, le marron.

Quand j’étais plus jeune, je fonçais sur les teintes vives, presque à l’aveugle. Avec le temps, j’ai appris à les apprivoiser, à les écouter un peu. Ces couleurs racontent quelque chose, elles ont une chaleur qui me parle vraiment », confie-t-il, la voix calme, presque comme un professeur partageant une leçon précieuse.

Son obsession pour les visages célèbres dépasse le simple hommage. Monroe coincée dans un embouteillage, Einstein fumant sa pipe… chacun de ces personnages devient une petite histoire à raconter sur la toile. « La musique m’accompagne souvent quand je peins, poursuit-il. On ne cherche pas à expliquer, on ressent. Le spectateur reçoit ce qu’il veut recevoir, selon sa sensibilité. » Cette liberté lui permet même d’apprécier la peinture abstraite, bien qu’il se consacre principalement aux portraits, qui restent la préférence de son public.

Le détail, chez lui, n’est jamais accessoire. Chaque trait, chaque nuance, a une raison d’être. « Je fais parfois des portraits de mon fils et de moi. Même si nous ne nous ressemblons pas exactement, je retrouve son essence, ses traits. Mona Lisa ? Quand je l’ai peinte, ses traits m’ont paru masculins… étrange mais fascinant. » Entre croquis et peinture, Sandy perfectionne son geste, mélange ses couleurs avec une minutie presque rituelle, comme un musicien accordant son instrument.

Depuis son atelier à Itaosy, l’objectif reste limpide : vivre de son art, de cette passion qui l’anime depuis l’enfance et qu’il continue de polir chaque jour. Ses portraits, oscillant entre humour décalé, références pop et précision technique, démontrent que l’art peut être à la fois intime et universel, sérieux et facétieux. Chaque toile devient alors un petit monde à explorer, où le spectateur est invité à entrer, à sourire, à réfléchir… et parfois, à se perdre un peu dans l’imprévisible.

Rova Andriantsileferintsoa

Sandy Nirina : +261 34 48 077 31

Laisser un commentaire
no comment
no comment - Exposition : L’économie a bonne mémoire

Lire

10 octobre 2025

Exposition : L’économie a bonne mémoire

De l’époque des royaumes à l’ère républicaine, Madagascar raconte son parcours économique à travers une exposition inédite. Organisée par FTHM Consult...

Edito
no comment - Mada fait son cinéma

Lire le magazine

Mada fait son cinéma

Il fut un temps — pas si lointain — où le cinéma malgache était timide, réduit à quelques projections confidentielles et à des moyens de fortune. Depuis un certain temps – ironie du sort ou simple justice poétique – ce sont nos films qui s’invitent sur les écrans du monde et des festivals sur les cinq continents. Felana Rajaonarivelo, Kuro Mi qui ont été récemment primés dans des festivals internationaux. Avec cette nouvelle génération de cinéaste, Madagascar rafle les prix et, surtout, les regards.
Il fut une époque où parler de « cinéma malgache » provoquait un sourire poli, celui qu’on réserve aux rêves un peu fous. D’autres se moquaient ouvertement de ces productions de niveau abécédaire. Désormais, ces points de vue moqueurs s’effacent pour laisser place à l’admiration. Les images sont plus nettes, les scénarios plus affûtés, les voix plus assurées. On sent cette montée en gamme, cette fierté tranquille d’un art qui prend enfin confiance en lui. Et c’est beau à voir — comme une pellicule qu’on aurait enfin sortie du grenier pour la projeter au grand jour.
Certes, des défis restent à relever, notamment en matière d’infrastructures, de financements, de formation… mais le vent tourne. Et ce vent-là sent la créativité, la sueur, et un peu de ce grain de folie propre à nos conteurs. La Grande-île ne veut plus être simple figurant dans l’histoire du septième art. Madagascar s’installe, doucement mais sûrement, dans le rôle principal. Au fond, ce renouveau n’est pas qu’un phénomène culturel. C’est une déclaration : ici aussi, on sait raconter. Et mieux encore, le faire rêver.

No comment Tv

Interview - Mascha et Vincent Paquot Rasquinet - Octobre 2025 - NC 189

Découvrez 𝐌𝐚𝐬𝐜𝐡𝐚 et 𝐕𝐢𝐧𝐜𝐞𝐧𝐭 𝐏𝐚𝐪𝐮𝐨𝐭 𝐑𝐚𝐬𝐪𝐮𝐢𝐧𝐞𝐭, comédiens, dans le 𝐧𝐨 𝐜𝐨𝐦𝐦𝐞𝐧𝐭® NC 189 - octobre 2025. 
Au mois de septembre, les compagnies belges 𝐓𝐢𝐠𝐮𝐢𝐝𝐚𝐩 et 𝐅𝐓𝐋 𝐉𝐮𝐠𝐠𝐥𝐢𝐧𝐠 étaient de passage à Madagascar. Initialement venus dans la Grande île pour assister au mariage de leurs amis, les deux comédiens ont eu un agenda très chargé. Ils ont présenté – presque chaque jour – la pièce muette « 𝑰𝒅𝒚𝒍𝒍𝒆𝒔 𝒂𝒃𝒓𝒂𝒄𝒂𝒅𝒂𝒃𝒓𝒂𝒏𝒕𝒆𝒔 ».

Focus

Randonnée du CASM

Randonnée du Club des Amateurs de Scooters de Madagascar - CASM - à Behenjy, le 17 octobre.

no comment - Randonnée du CASM

Voir