Flo Le Tantsaha : Concevoir des solutions abordables pour les paysans
31 août 2024 // Nature // 4870 vues // Nc : 176

Après des études en biologie puis une spécialisation en écologie, Florian ambitionnait de reverdir des déserts ou de protéger les forêts naturelles. Actuellement, ce botaniste tropical, installé à Antsirabe, reconverti à l’agriculture a sa propre structure de vente de semences, de plantules, et de formations. Pour lui, les paysans sont invisibilisés alors que c’est grâce à eux que tout le monde mange.

Quel est le potentiel agricole des sols malgaches ?
Les terres malgaches sont comme de nombreuses terres tropicales anciennes : pauvres, mais avec un potentiel énorme grâce au climat. Un sol fertile peut rapidement se recréer avec les techniques adaptées, notamment en copiant le système des forêts où l'arbre est le moteur même de la richesse des forêts tropicales : les feuilles tombent, forment une litière épaisse qui se dégrade grâce aux micro-organismes, la chaleur et les pluies.

C'est ce système que j'élabore dans mes champs : les arbres sont les premiers producteurs de biomasse pour réenrichir des sols terriblement pauvres. Certaines terres, notamment volcaniques, souvent présentes à Madagascar, sont par contre un véritable pain béni pour les paysans.

En quoi consiste votre travail ?
Je fais du criblage variétal, c'est à dire essayer différentes variétés de semences, pour sélectionner ensuite les plus résistantes. La première phase de sélection se fait en milieu contrôlé, où je les chouchoute un peu. Les phases de sélection suivantes se passent dans nos champs, sans plus aucune aide : les faibles meurent, attaquées par les maladies ou les nuisibles et ne se reproduisent donc pas. Les plus résistantes naturellement vont survivre, se reproduire et ainsi transmettre leurs résistances aux prochaines générations. La conservation de nos semences se fait au gel, à -14°c. Cela permet un optimum de conservation pour la plupart des semences sèches.

En quoi est-ce important pour l’autosuffisance alimentaire ?
Pour moi, parler d'autosuffisance alimentaire sans parler d'autonomie en engrais, en semences et en fanafody ne signifie pas grand-chose. Or, j'ai réussi à développer des pratiques qui permettent cette autonomie totale, avec des moyens adaptés aux paysans : très largement abordable d'un point de vue économique, facile, rapide et efficace. Voyez un peu : sur un hectare de culture, je produis 160m3 de compost par an, tous mes fanafody, et toutes mes semences. Grâce à mes arbres et plantes utiles. L'agriculture malgache souffre, car les paysans n'utilisent pas assez d'engrais par manque de moyen, et quand bien même ils auraient les moyens, l'engrais ne suffit pas. D'où l'intérêt de développer des alternatives au fumier (je suis 100% compost, 0% taim-biby) et au NPK très cher. Je privilégie les arbustes à croissance rapide, qui ont pour but de produire de la biomasse verte pour le compost ou bien le fourrage animal. Si possible endémiques bien sûr !

Et pour la survie de certaines espèces végétales ?
Pour mon cas personnel, j'ai réussi à valoriser une espèce végétale endémique en danger, le crotalaria craspedocarpa, afin d'en faire des haies vives productrices d'engrais vert pérenne. Elles attirent aussi lors de leur floraison de nombreux insectes pollinisateurs endémiques. Je cultive aussi des barleria alluaudii, endémiques, pour faire des haies défensives fleuries, des hafotra (dombeya) pour les abeilles et des pollinisateurs, des amena, sorte d'orties immenses de 15m de haut, souvent considérées sacrées et plantées près des tombeaux de certains rois. Les pépiniéristes, agriculteurs paysans et semenciers sont ceux qui connaissent le mieux les plantes avec les tradipraticiens, les scientifiques et les personnes vivant dans la forêt par la forêt. Ils sont un peu comme des gardiens du savoir, qui transmettent leurs richesses via leurs prestations.

Propos recueillis par Mpihary Razafindrabezandrina

Photos : Flo le Tantsaha
Mail : florian.fraixbavuz@gmail.com

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Décembre arrive et, comme chaque année, Madagascar se réveille culturellement.
Soudainement, les salles de spectacle se remplissent, les artistes sortent du bois, les concerts s’enchaînent. C’est la saison des festivités de Noël mêlant sacré et profane, et des expositions de dernière minute. Bref, tout le monde s’active comme si l’année culturelle se jouait en un seul mois. Et franchement, il y a de quoi se poser des questions. On ne va pas se mentir : les artistes malgaches ne sont pas là uniquement pour nous divertir entre deux repas de fête. Ils bossent, ils créent, et à leur niveau, ils font tourner l’économie. Le secteur culturel et créatif représentait environ dix pour cent du PIB national et ferait vivre plus de deux millions de personnes. Pas mal pour un domaine qu’on considère encore trop souvent comme un simple passe-temps sympathique, non ?
Alors oui, ce bouillonnement de décembre fait plaisir. On apprécie ces moments où la création explose, où les talents se révèlent, où la culture devient enfin visible. Mais justement, pourquoi faut-il attendre décembre pour que cela se produise ? Pourquoi cette concentration frénétique sur quelques semaines, alors que les artistes travaillent toute l’année ? Des mouvements sont actuellement en gestation pour revendiquer leur statut d’acteurs économiques essentiels et pour que l’on accorde à nos créateurs une place réelle dans la machine économique du pays. La culture malgache vaut bien mieux qu’un feu d’artifice annuel. Elle mérite qu’on lui accorde l’attention qu’elle réclame douze mois sur douze.

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