Eric Mayo « Dynamiser le marché local face à la crise de l’exportation »
17 décembre 2023 // Entreprendre // 4324 vues // Nc : 167

Depuis le mois de septembre, l’Union Européenne a imposé une nouvelle norme pour la vanille qu’elle importe : le taux de nicotine toléré passe de 0,3 mg par kilogramme à 0.05 mg par kilogramme, pour protéger les consommateurs. Une mesure dont l’entrée en vigueur disqualifie le tiers de la récolte actuelle. Face à cette crise de l’exportation, certains opérateurs de la vanille essaient de combler le trou en dynamisant le marché local. Eric Mayo, en tant que spécialiste des produits à base de vanille chez Bioneo Madagascar, une entreprise spécialisée dans la vente d’huiles essentielles, dont des produits dérivés de la vanille a observé de près chaque maillon de cette chaîne de valeur.

De la nicotine dans la vanille, comment l’expliquez-vous ?
La présence de nicotine dans la vanille résulte d’une contamination pendant le traitement : sur les planches de travail, dans les salles de stockage mixtes, où on stocke aussi d’autres produits. Face à cette menace, les autorités essaient de négocier avec la Commission Européenne sans avoir abouti à une entente. Un coup dur pour cette filière clé qui a déjà souffert d’une crise sans précédent : début 2023, la fixation du prix minimum à 250 dollars par kilogramme a échoué. Le Ministère de l’Industrialisation, du Commerce et de la Consommation a décidé de libéraliser le secteur.

Quelles menaces pour la grande exportation ?
D’abord il y a de plus en plus d’acteurs économiques de la vanille dans le monde, des concurrents comme l’Ouganda, le Tahiti, la Nouvelle Calédonie, la Hollande. Il y a de plus en plus de producteurs, on a un marché qui est en train de s’atomiser. En termes de production, il y a notamment l’Indonésie et la Chine qui produisent beaucoup plus.

Concernant la nouvelle norme de l’Union Européenne sur le taux de nicotine, je me demande d’où sort une telle décision, j’ai plutôt l’impression qu’il s’agit d’une guerre économique pour privilégier une vanille par rapport à la vanille qui vient de Madagascar. Et bien sûr, comme souvent pour l’exportation, il y a des contraintes difficiles, notamment sur les réglementations dans les douanes : j’ai l’impression que les interdictions se font de façon aléatoire, quand on demande sur quelles bases juridiques les restrictions sont fondées, il n’y a pas de réponse. Et dans l’ensemble, le prix a baissé : il y a cinq ans, on vendait le kilogramme de vanille entre 500 à 1000 euros selon la qualité, et actuellement, on le vend à 100 euros.

Quelles opportunités offrent le marché interne ?
Pour Madagascar, il y a deux qualité de vanille. D’abord, il y a la vanille gourmet de meilleure qualité, et la vanille de moindre qualité qui sont la vanille TK et la vanille rouge. Pour la vanille de qualité gourmet, le marché est stable, la demande est toujours là. Ce qui n’est pas le cas pour la vanille de moindre qualité : d’autres pays les vendent à un prix plus concurrent. Donc, pour rester une référence dans la filière vanille, Madagascar doit s’orienter dans la vanille de haute qualité, et c’est ce que nous faisons en tant que détaillant local. Comme sur tout produit de qualité, le prix a un impact moindre. C’est surtout le tourisme qui assure cette demande continue en vanille de qualité gourmet. Justement, la tenue des Jeux des Iles cette année, a dynamisé le marché local, nous avons beaucoup travaillé. En France, le kilogramme se vend entre 600 à 700 euros maintenant, contre 100 euros ici, ce qui attire les touristes. Ce sont eux qui viennent, à l’inverse de l’exportation.

Comment maintenir ce marché interne en vie ?
Pour garantir cette qualité, il faut une certification après des analyses chimiques. Pour obtenir la norme Afnor, il faut analyser la teneur en eau, le taux de vanilline. Pour la vanille gourmet donc, le taux d’humidité est entre 30% et 38%, et le clou est souple et charnu. Pour maintenir un rapport-qualité prix qui, à la fois, protège l’opérateur économique et attire le client, il faut minimiser les charges de production. Pour mon cas, je négocie le prix sur l’année à venir, je préserve la vanille à l’aide d’une machine sous vide. De cette façon, j’en ai toujours en réserve et je ne crains pas des coûts d’approvisionnement imprévus au cas où le prix change.

Propos recueillis par Mpihary Razafindrabezandrina
Contact : 034 69 834 95

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Décembre arrive et, comme chaque année, Madagascar se réveille culturellement.
Soudainement, les salles de spectacle se remplissent, les artistes sortent du bois, les concerts s’enchaînent. C’est la saison des festivités de Noël mêlant sacré et profane, et des expositions de dernière minute. Bref, tout le monde s’active comme si l’année culturelle se jouait en un seul mois. Et franchement, il y a de quoi se poser des questions. On ne va pas se mentir : les artistes malgaches ne sont pas là uniquement pour nous divertir entre deux repas de fête. Ils bossent, ils créent, et à leur niveau, ils font tourner l’économie. Le secteur culturel et créatif représentait environ dix pour cent du PIB national et ferait vivre plus de deux millions de personnes. Pas mal pour un domaine qu’on considère encore trop souvent comme un simple passe-temps sympathique, non ?
Alors oui, ce bouillonnement de décembre fait plaisir. On apprécie ces moments où la création explose, où les talents se révèlent, où la culture devient enfin visible. Mais justement, pourquoi faut-il attendre décembre pour que cela se produise ? Pourquoi cette concentration frénétique sur quelques semaines, alors que les artistes travaillent toute l’année ? Des mouvements sont actuellement en gestation pour revendiquer leur statut d’acteurs économiques essentiels et pour que l’on accorde à nos créateurs une place réelle dans la machine économique du pays. La culture malgache vaut bien mieux qu’un feu d’artifice annuel. Elle mérite qu’on lui accorde l’attention qu’elle réclame douze mois sur douze.

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