Mamy Ralaivita « Dans la musique, il faut toujours se référer aux racines »
4 septembre 2023 // Musique // 13934 vues // Nc : 164

Premier malgache à obtenir le Prix Découvertes RFI en 1983, le fianarois Mamy Ralaivita a marqué la scène locale et internationale. Avec ses chansons folks inspirées du horija betsileo, un chant polyphonique accompagné de battements de mains, il est devenu l’ambassadeur de la musique malgache. Il a su allier la musique traditionnelle et moderne.

Vos débuts dans la musique ?
J’ai commencé ma carrière de chanteur vers 1975. J’étais membre d’un groupe qui s’appelait « Zanak’i Dada ». Nous faisions surtout du folk song qui est un genre de chanson engagée surtout que c’était pendant la période de la révolution socialiste. Nos chansons étaient surtout axées sur l’amour de la patrie, par exemple : notre chanson « Avereno Aminay », sorti en 1976, que l’ancien Président Ratsiraka a utilisé pour faire le mita-be dans les stades des grandes provinces de Madagascar. Il y a également la chanson « Jomaka am-pamakona » qui prône la vérité au niveau de la société. En 1978, j’ai dû effectuer un service militaire qui était obligatoire pour tous les bacheliers. Comme je l’ai effectué dans le Sud, je me suis imprégné de la tradition « bara » surtout de la musique traditionnelle. Je suis entré à l’Université, à la faculté de médecine en 1979. Là-bas, j’ai intégré le « ORO » ou Orkesitrin’ny Rektoralin’ny Oniversitea dont je suis l’un des précurseurs. L’orchestre recrutait ceux qui avaient du talent et  organisait surtout des bals.

Le prix Découvertes RFI, une consécration dans votre carrière ?
La RFI (Radio France Internationale) avait organisé un concours musical pour les pays africains en 1982 et donc, l’ORO a décidé de participer. Le souci, c’est qu’on ne pouvait pas s’inscrire en groupe mais seulement en solo. J’ai été alors désigné pour participer en raison de l’originalité de ma musique. J’ai décidé de faire des chansons betsileo, surtout inspirées du horija. Cependant, j’ai décidé de la moderniser, et c’est comme ça que la chanson « Tanalahy » a vu le jour, qui m’a permis de remporter le Prix Découvertes. Je suis ensuite allé en France pour enregistrer la chanson sur un disque vinyle à double face : la face A pour la chanson « Tanalahy », et la face B pour un autre slow. Après, je me suis envolé pour Togo afin de recevoir le prix, c’est-à-dire 7.000 FCA et une bourse d’une année pour étudier au conservatoire. Malheureusement, j’ai dû retourner à Madagascar, car je devais encore terminer mes études. Après mon retour, j’ai enchainé les concerts et tournées dans tout Madagascar avec le groupe ORO, entre 1982 et 1985.

On peut dire que vous êtes l’ambassadeur de la musique malgache ?
C’est durant ma jeunesse, entre 1975 et 1984 qui m’ont plus marqué dans ma carrière. C’est surtout la possibilité de montrer l’originalité de la musique malagasy à travers mes chansons, c’est-à-dire de montrer ce qui différencie les malagasy au niveau du rythme ou « beating » ou encore tempo. La musique Malagasy a un rythme particulier, ternaire qui la différencie des autres. Par exemple, le salegy, qui est un rythme propre à nous. J’ai également pu apporter quelque chose de nouveau au niveau international, à travers la fusion entre la musique traditionnelle et la musique.

Malheureusement, vous avez dû arrêter la musique ?
En fait, j’ai commencé mon internat en médecine en 1986, car j’avais presque terminé mes études, et donc j’ai travaillé à Toliara. J’étais tellement pris par mon travail, tant le poste était délicat, je n’avais plus le temps pour faire de la musique. J’ai donc fait une très longue pause jusqu’en 2007, où j’ai produit un CD, accompagné de mes enfants. Le CD contient quelques chansons. A part cela, j’ai également commencé à retourner sur scène, notamment dans les cabarets. Lors de mon spectacle à « Fara West » à Andohalo il y a quelques mois, j’ai eu pleins de réactions positives de ceux qui y ont assisté. Il y avait des malagasy, mais également des étrangers. J’ai également été étonné car les musiciens qui m’ont accompagné étaient encore jeunes, presque le même âge que mes enfants. C’est alors deux générations sur la même scène, et je ne m’attendais pas à ce que le public apprécie encore ma musique.

Votre avis sur la musique actuelle ?
La technologie est très avancée de nos jours, et même un peu trop. Même les amateurs qui ne connaissent pas grand-chose à la musique peuvent produire des chansons. C’est pour cela que les chanteurs ne gardent plus leur identité alors qu’il faut la valoriser et toujours se référer aux racines, c’est cela qui rend la musique attrayante, surtout au niveau international. Les chanteurs comme Jaojoby ou Tarika Salala gardent leur identité à travers leur musique. De mon côté, je ne prévois pas de faire de grands spectacles, mais de me produire dans des cabarets. Je préfère laisser cela aux jeunes, car moi, j’ai juste ouvert le chemin.

Propos recueillis par Maminiaina Yannick

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Décembre arrive et, comme chaque année, Madagascar se réveille culturellement.
Soudainement, les salles de spectacle se remplissent, les artistes sortent du bois, les concerts s’enchaînent. C’est la saison des festivités de Noël mêlant sacré et profane, et des expositions de dernière minute. Bref, tout le monde s’active comme si l’année culturelle se jouait en un seul mois. Et franchement, il y a de quoi se poser des questions. On ne va pas se mentir : les artistes malgaches ne sont pas là uniquement pour nous divertir entre deux repas de fête. Ils bossent, ils créent, et à leur niveau, ils font tourner l’économie. Le secteur culturel et créatif représentait environ dix pour cent du PIB national et ferait vivre plus de deux millions de personnes. Pas mal pour un domaine qu’on considère encore trop souvent comme un simple passe-temps sympathique, non ?
Alors oui, ce bouillonnement de décembre fait plaisir. On apprécie ces moments où la création explose, où les talents se révèlent, où la culture devient enfin visible. Mais justement, pourquoi faut-il attendre décembre pour que cela se produise ? Pourquoi cette concentration frénétique sur quelques semaines, alors que les artistes travaillent toute l’année ? Des mouvements sont actuellement en gestation pour revendiquer leur statut d’acteurs économiques essentiels et pour que l’on accorde à nos créateurs une place réelle dans la machine économique du pays. La culture malgache vaut bien mieux qu’un feu d’artifice annuel. Elle mérite qu’on lui accorde l’attention qu’elle réclame douze mois sur douze.

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