Audrey Randriamandrato (MWE) « Parole aux femmes »
6 mars 2021 // Assos // 2529 vues // Nc : 134

Depuis trois ans, l’ONG Malagasy Women Empowerment (MWE) lutte pour l’amélioration des conditions et des représentations de la femme malgache dans la société. Selon Audrey Randriamandrato, fondatrice de l’organisme, Madagascar a tout le potentiel pour revenir à la base de sa société : égalitaire.

Malagasy Women Empowerment, en quelques mots ?
Nous faisions partie du mouvement Madagascar Will Rise mais nous sommes aujourd’hui une organisation indépendante. L’histoire est assez personnelle : survivante d’agressions sexuelles dans la rue et au travail, je me suis demandé qu’est-ce qui pouvait arriver à des millions d’autres femmes malgaches, peut-être cent fois pire. MWE lutte ainsi pour l’amélioration des conditions et des représentations de la femme dans la société. La représentation, car il suffit de taper « femmes malgaches » et « hommes malgaches » sur Google pour voir la différence de traitements…

Comment avez-vous évolué ?
En mai 2018, nous avons organisé un atelier à Paris, nous n’étions que cinq.

C’était un échec parce qu’encore une fois nous nous sommes dits : la cause des femmes importe peu aux gens. Sans jamais cesser de travailler et d’y croire, nous avons aujourd’hui une équipe de 18 Empowered Changers en France, huit à Madagascar, bientôt une équipe au Luxembourg et l’objectif d’une centaine de candidatures bénévoles pour 2021. Nous n’avons pas reçu énormément de soutien au départ mais avec la volonté de six membres, nous comptons plus d’une vingtaine d’actions, plus de 1 000 sympathisants, et un budget annuel assez conséquent à partir de rien.

L’autonomisation des femmes malgaches reste donc un combat de longue haleine…
La femme malgache a une place très importante dans le développement du pays. Madagascar compte environ 25 millions d’habitants dont la moitié de la population est constituée de femmes. D’un côté, nous avons des activistes, des politiciennes, des scientifiques, des autrices (féminin d’auteur, NDLR), des fonctionnaires, des étudiantes qui se battent pour leurs droits en société… attention, aucun droit n’est acquis. ; de l’autre côté, nous avons une majorité précaire de femmes délaissées, je pense à toutes les employées de maison, les travailleuses du sexe, les femmes sans emploi, les femmes victimes de violence morale et physique qui, aujourd’hui, récoltent les fruits de l’indifférence. Aujourd’hui, les femmes malgaches souffrent encore des conséquences d’un système économique déficient. Elles sont beaucoup à se tourner vers la prostitution ou un travail « indécent » pour pouvoir nourrir leur foyer. C’est pourquoi en tant que privilégiées, nous luttons pour que la société malgache arrête de soumettre, d’effacer et de réduire les femmes au silence.

Quels types d’actions menez-vous, notamment auprès des jeunes ?
Chaque année, depuis deux ans, nous organisons l’événement du 8 mars. Nous avons organisé des expositions, une séance de film-documentaire (Woman d’Anastasia Mikova et Yann Arthus-Bertrand au Cinepax), des journées récréatives dédiées à la santé sexuelle et reproductive des femmes. Cela fait maintenant trois ans que nous accompagnons dles jeunes du Lycée Moderne Ampefiloha autour des thèmes du leadership, du management de projet, des relations amicales et amoureuses saines, mais également autour de l’éducation sexuelle éclairée. Nous avons réalisé une distribution de 200 packs de serviettes hygiéniques durables sur cinq ans à des jeunes filles d’Antananarivo, de Toamasina, de Fénérive-Est et de Toliara pour lutter contre la précarité menstruelle. Nous allons également engager une action pour distribuer des serviettes au sein de la prison des femmes d’Antanimora. Nous réalisons enfin des groupes de parole à Madagascar comme en France. En France, nous organisons des événements pour faire rayonner la cause des femmes de Madagascar.

Les projets ?
Le plus gros chantier que nous ayons cette année est le projet Ilotsaina sur le Centre d’écoute, d’éducation et de prévention sur la santé sexuelle et reproductive pour 3 000 habitants d’Ambohitrarahaba. Nous sommes aussi lauréates 2020 de l’appel à projets PRA/OSIM (Programme d'appui aux projets des organisations de solidarité internationale issues de l'immigration) du Forum des migrations (Forim) et de l’Agence française du développement (AFD) ; cela va nous permettre de financer le démarrage du projet cette année. En France, nous sommes également lauréates d’un appel à candidatures de La Cité Fertile, nous avons donc l’objectif d’organiser un forum autour de trois ODD (Objectifs de développement durable),  « S’engager pour l’autre bout du monde », sur un week-end de trois jours en 2021. Notre projet à plus long terme est de pérenniser et de multiplier nos actions pour amplifier le mouvement en faveur du droit des femmes et de l’inclusion des hommes dans nos combats à Madagascar comme dans le monde.


Propos recueillis par Aina Zo Raberanto

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Mais ça tape à côté. Les langues sont vivantes, elles mutent, s’adaptent, empruntent. Vouloir figer la langue malgache dans le marbre, c’est oublier qu’elle-même s’est forgée dans les métissages. Au lieu de condamner l’évolution, peut-être faudrait-il l’accompagner avec lucidité. Éduquer sans mépriser. Valoriser sans enfermer. Et surtout, cesser de pleurer une langue qu’on refuse d’habiter pleinement.

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