Tahiry Ramanantsoa : « Le genre qui gagne »
13 mars 2013 - Éco SociétéNo Comment   //   2805 Views   //   N°: 38

Depuis quinze ans, des sociétés aussi diverses que Madatours, Madavision, Madajob, La Grande Braderie de Madagascar ou le Madagascar Trade Show portent sa griffe d’entrepreneure au féminin. Typiquement le « genre » qui gagne et qui n’hésite pas à le revendiquer en cette Journée internationale de la femme.

La femme est l’avenir de l’entreprenariat à Madagascar ?
Le monde de l’entreprise se fera avec nous, et nous l’avons prouvé. Prenons l’exemple du GEM (Groupement des entreprises de Madagascar) dont le numéro un est une femme ou encore l’EFOI (Entreprendre au féminin océan Indien), un organisme présent dans plus de 49 pays et visant à renforcer le réseau des femmes entrepreneures. Les femmes sont des entrepreneures nées, c’est sans équivoque, tout simplement parce qu’elles sont polyvalentes.

Par leur statut d’épouses et de mères, elle savent gérer plusieurs choses à la fois : les tâches ménagères, les courses, les enfants, les sorties… C’est justement ça savoir entreprendre, anticiper, gérer les conflits, négocier. L’intelligence, c’est une autre question.

Mais je pense que les femmes n’ont pas besoin de se comparer aux hommes quant à leur efficacité et leur intelligence.

Quels plus apportent-elles à l’entreprise ?
Elles sont plus sur le long terme et cela implique un certain type de management, je dirais moins rentre-dedans, plus stratège, mais tout aussi ferme. Du fait de leur aptitude à la polyvalence, elles intègrent aisément tous les aspects d’un dossier : rentabilité, environnement, ressources humaines, développement personnel. Leur grand problème est qu’elles sont isolées, en tout cas en minorité dans l’entreprise. D’où l’intérêt d’intégrer des réseaux oeuvrant pour la promotion de la femme, avec souvent des formations à la clé. Pour ma part, j’applique un management participatif et une communication directive. J’encourage mes employés à s’impliquer de toute leurs forces pour qu’ensemble nous gagnions. Je pense que la vie de mes employés est le nerf de mon entreprise, si mon employé s’y sent bien, ma société ne s’en portera que mieux.

La discrimination au travail est-elle toujours une réalité ?
Elle existe, c’est un fait, rien qu’au niveau du recrutement. Beaucoup de sociétés orientent leur choix sur les hommes car une femme est toujours susceptible d’avoir des enfants, ce qui va engendrer à terme des charges supplémentaires pour la société. Les femmes avec des enfants en bas âges sont elles aussi perçues comme des sources de problèmes avec les arrêts maladies. Quant au harcèlement physique, il existe partout où existe un manque d’éducation et une méconnaissance du droit de travail. Pas dans ma société qui est constituée à majorité de femmes…

Des conseils pour celles qui veulent entreprendre ?
En ce moment, vu la conjoncture, ce n’est pas chose facile et je le déconseille vivement à toutes les femmes qui souhaitent franchir le pas. Il faut attendre que la situation économique et politique s’éclaircisse pour savoir où mettre les pieds. Ce qui n’empêche pas déjà de réfléchir à son projet, de faire des études de marché, monter son business plan ou son plan marketing… Dans l’export, l’activité est totalement indépendante du marché local, donc il n’y a aucune restriction à se lancer maintenant. C’est en ces temps de crises que les bons entrepreneurs sortent du lot et pour cela il faut beaucoup d’innovation et de créativité.

Vous-même avez créé cinq entreprises…
Tout s’est fait étape par étape et en laissant les choses s’emboîter. En créant Madavision en 1998, nous nous sommes rendus compte que les périodes de solde n’existaient pas et nous avons alors lancé La Grande Braderie de Madagascar.
Ensuite, nous avons remarqué qu’il n’y avait aucun bureau de placement ou de recrutement à Tananarive pour faciliter les embauches, et c’est ainsi que Madajob est né. Lors d’un voyage à Bangkok, nous avons rencontré le consul honoraire de Madagascar qui nous a proposé de faire venir des opérateurs malgaches qui seraient à la recherche de partenaires thaïlandais. De là est né le Madagascar Trade Show (MTS) qui a déjà eu lieu en Thaïlande, en Afrique du Sud, à Dubaï et en Chine. Enfin, dans le sillage du MTS, nous avons décidé de créer Madatours, une agence de voyage spécialisée dans le tourisme business. Toujours profiter de la situation et savoir prendre les bonnes idées où elles se trouvent. Avec Madatours, nous avons développé en 2011 la Smile Box, un pack découverte de Madagascar sous forme de cadeaux destinés aux touristes nationaux et aux résidents, une formule qui connaissait déjà un grand succès en Europe.

En 2010, vous avez reçu le Trophée du jeune entrepreneur…
(Rires) Jeune, je ne sais pas. Quand nous avons décroché le trophée en 2010, mon mari et moi, cela couronnait quinze ans de dur labeur, des années et des années de persévérance. Cela a surtout conforté notre conviction qu’à Madagascar tout est à créer. Aujourd’hui, en raison de l’incertitude qui règne sur le monde entrepreneurial, nous ne pouvons plus faire de prévisions, de projections et cela nuit énormément à la viabilité de notre activité. Mais je ne me laisse pas gagner par la crise.
Cette année, nous allons perfectionner tous nos produits, que ce soit pour MadaTours, MadaJob ou SmileBox pour qu’ils puissent répondre encore mieux aux attentes de nos clients. Pour cela, nous allons lancer des produits dérivés comme la SmileCard et le ChèqueSmile. Mais pour moi 2013 va marquer un fort engagement dans la vie associative. Juste retour des choses.

 

Propos recueillis par #AinaZoRaberanto

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