Sanndya Soa : Mon retour est surtout un fantasme
Sanndya Soa, 30 ans, est assistante sociale en région parisienne. Native de Toliara, elle vit en France depuis quatre années. Cette jeune maman qui rêve de liberté croit à sa bonne étoile.
Le père, professeur de lettres françaises, est originaire de la région Sava ; la mère, institutrice, de Befandriana Nord. Quatrième enfant d’une famille qui en compte six, Sanndya grandit à Toliara où ses parents se sont rencontrés quand ils étaient étudiants. Elle fréquente un groupe scolaire privé d’obédience musulmane jusqu’au bac. À 16 ans, comme ses « frères et soeurs », elle rejoint la capitale pour y suivre un double cursus de quatre années en lettres françaises et en sociologie : « Une manière de couper le cordon et de grandir. »
À 22 ans, elle arrête ses études pour travailler dans la « consultance », pour un bureau d’études privé. Mais, trois ans plus tard, sa mère la persuade de reprendre ses études : « Je l’ai écoutée, j’ai fait un DEA en Sciences sociales. » L’année suivante, elle est admise en Master 2 d’études sociales et politiques à Paris dans une « université prestigieuse », Panthéon-Assas. Bénéficiaire d’une bourse dont le versement se fait cruellement attendre, elle est logée dans un foyer universitaire malgache à Cachan : « Je n’ai rien perçu pendant cinq mois mais ma soeur a réussi à débloquer la situation et j’ai été pistonnée pour cette chambre à bas coût : 175 € plus 9 € d’électricité par mois. »
Elle s’acclimate très vite, elle parle la « langue du pays » et « tout le monde » est « agréable ». Elle papillonne bientôt avec un étudiant malgache. La « vie parfaite » ! Mais inexplicablement, elle sombre dans une sorte de « spleen » : « Je ne me sentais pas bien, c’était diffus. » Elle veut rentrer mais s’amourache de son zazou : « J’ai trouvé l’amour et je suis restée. »
Elle passe deux mois de vacances au pays et sa mère la met en face de ses responsabilités : « Quand est-ce que tu vas avoir un enfant ? J’espère que tu n’es pas stérile ! » Toute « chamboulée », elle s’inscrit à Orsay (Paris XI) en relations internationales mais sa mère l’a « déboussolée » et ses beaux-parents la harcèlent « sur la même question. » D’un commun accord, le couple enfante. Devenue mère, son « plan de carrière s’est effondré » : « Je m’occupe de mon fils comme d’un petit bijou. » Possessive, elle peine à se détacher de son fils : « Il a fallu que j’apprenne à déléguer aux autres. »
Après un an de recherche, elle accepte un emploi d’assistante de vie auprès de personnes âgées et obtient, par équivalence, le diplôme d’assistante sociale : « C’était le moyen d’avoir une vie plus sereine. Aujourd’hui, je travaille dans une mairie. Je crois que j’ai une bonne étoile. » Sanndya n’a pas pour autant renoncé à ses rêves : « J’essaie de convaincre mon compagnon mais je suis partagée. Il y a beaucoup de choses que je peux offrir à mon fils ici mais j’ai aussi peur de la crise d’identité que traverse la France. » Elle sait aussi qu’en rentrant, elle perdra son « statut » et sa « stabilité » : « Mon retour est surtout un fantasme. »
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