Rakoto : Trop belle ma cocotte !
La marmite en aluminium fait partie de l’équipement indispensable de toute famille malgache. Visite chez Rakoto, un artisan débrouillard qui fabrique ses cocottes à partir d’aluminium recyclé.
Dans une cour de terre battue, envahie d’objets métalliques, Rakoto, pieds nus et torse noir de charbon, retire du feu la casserole fumante à l’aide d’une longue pince. Il se retourne vivement, pénètre dans une étroite et sombre cabane. A l’intérieur, il fait couler le liquide rouge vif et visqueux de l’aluminium en fusion dans un tube large comme un doigt. Le métal grésille et une odeur acre envahit la pièce. Quelques minutes plus tard, il défait le cadre en bois rempli de terre qui sert de moule, et ressort un marmite éclatante couleur argent. Dix minutes de tension et de précision, et la cocotte, après un coup de lime, est prête pour la vente.
Rakoto et ses trois employés produisent ainsi en moyenne une cinquantaine de marmites par jour. Le protocole est toujours le même : le plus vieux des ouvriers détruit à grands coups de marteau les matériaux récupérés.
Puis chaque pièce est passée dans un four spécial : « Sous l’effet de la chaleur, l’aluminium se sépare de toutes les impuretés », explique doctement Rakoto. Le métal est ensuite chauffé à plus de 600°C et coulé dans les gabarits en sable, reproduits pour chaque nouvelle marmite.
« Ce qui est le plus difficile, c’est de trouver la matière première », continue l’artisan. Quand on lui parle de recyclage, il répond récupération et ingéniosité : « On prend tout ce qui est en alu : ancienne casserole, jante de voiture, fil électrique, cardan de Mobylette. Comme il n’y a pas d’aluminium brut à Madagascar, on fait avec ce qu’on trouve. » Son atelier consomme plusieurs centaines de kilo d’aluminium par mois (en moyenne 20 kg pour dix casseroles) et tout autant de charbon.
Si Rakoto reconnait volontiers que la terre de prédilection des cocottes en alu est Ambatolampy, il défend qu’il n’a rien à leur envier : « A Ambatolampy, c’est là qu’on trouve la terre pour les moules, un sable humide très riche en argile. On y cherche aussi des outils. Mais nos cocottes sont moins chères et tout aussi solides. »
Rakoto vend ses marmites à Fianarantsoa, au marché ou chez lui, dans le Sud jusqu’à Ihosy et même jusqu’à Ambositra au Nord, traditionnellement approvisionné par Ambatolampy. Une reconnaissance dont il tire une certaine fierté : « J’ai appris un an avec un artisan, puis je me suis lancé tout seul à mon compte, depuis presque dix ans. Je ne suis pas riche et mon travail est dur, mais j’ai une maison, des enfants à l’école, et je mange à ma fin tous les jours. » Dans de belles marmites.
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