Rado Rakotorahalahy : Ombre et lumière
2 février 2013 - MusiquesNo Comment   //   3091 Views   //   N°: 37

Accompagnateur des plus grands noms du jazz local, on en oublierait presque qu’il est l’un des auteurs-compositeurs les plus accomplis de sa génération. Un maître patient qui attend d’accoucher de l’album solo qui le révèlera enfin à la lumière.

S’il joue pratiquement de tous les instruments, cela fait des années qu’il ne lâche plus les baguettes et les fûts. Depuis l’âge de 15 ans exactement. Si sa vocation est de mettre en valeur le talent des autres, il sait qu’aujourd’hui, plus que jamais, il est temps de se faire un nom. Sortir enfin de l’ombre. Mais pas si simple que ça quand on a passé le plus gros de sa carrière à composer, jouer ou écrire pour les plus grands noms de la scène locale (Fanja Andriamanantena, Nanie, le groupe Johary, Datita Rabeson, Solo Andrianasolo, Anyah) et que par nature on n’est pas du genre à se mettre en avant. « Pas envie de jouer les vedettes, de me mettre sous les feux des projecteurs », proteste Rado Rakotorahalahy.

L’homme est d’abord un sacré perfectionniste, un insatisfait chronique qui n’acceptera de sortir son premier album solo que s’il est irréprochable. C’est ainsi que depuis 2010, il planche sur cette galette idéale dont il retarde de mois en mois la sortie. « Des créations qui me plaisaient il y a des années me convainquent beaucoup moins aujourd’hui », se désespère-t-il. Un opus qu’il annonce aussi varié que ses influences, de Beethoven à John Coltrane en passant par Creedance Clearwater Revival, James Taylor ou Boyz II Men ! Etiqueté batteur de jazz dans les milieux autorisés, Rado n’en revendique pas moins le plus grand éclectisme. « Ecouter tous ces styles différents me permet de donner plus de relief à mes propres compositions. De toute façon, on peut difficilement se spécialiser à Madagascar. Si on veut vivre de ce métier, il faut accepter de toucher à tout. » Ce qui l’amène à arranger en studio, au hasard des enregistrments, aussi bien du tsapiky que du salegy.

Mais une chose est sûre, il ne jouera jamais de heavy metal : « Ce qui incite à la rébellion, ce qui exprime des sentiments négatifs, je l’évite par conviction personnelle ». Il est vrai que ses compositions débordent d’optimisme, une rythmique bourrée de vibrations qui donne aussitôt envie de claquer des doigts. Sans angélisme particulier, uniquement parce que c’est dans sa nature. Et toujours cette touche jazzy qui fait mouche, comme sur l’album Isaky Ny (2008) de Nanie dont il a quasiment écrit tous les titres, entre funk torride et rythmes latinos !

Elève de Samy Andriamanoro – « celui qui m’a le plus appris en terme de jazz » -, Rado bénéficie aussi d’une voix exceptionnelle à la George Benson, chanteur dont il s’est amusé reprendre les standards lors d’un concert mémorable au Piment Café en 2011. Ajoutez à cela un vrai talent à la guitare et au piano et vous avez sans doute le croque-notes le plus doué de sa génération. Un musicien tombé dedans tout petit, puisque ses parents Bruno Rakotorahalahy et Joeline Rasoarimanana ont fait partie du groupe Vahiné. « De ma mère j’ai hérité d’un vrai goût pour la création et de mon père bassiste d’une facilité naturelle pour la musique. » L’homme s’impose enfin comme un pédagogue né, un authentique dénicheur de talents à travers ses ateliers de chanson à l’Alliance française qui lui ont permis de révéler quelques valeurs de demain comme Anaa Quatuor ou D-Lain. Existerait-il une école Rado Rakotorahalahy ?

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