Mpanetsa : La longue route des repiqueurs de riz
21 mars 2017 - MétiersNo Comment   //   2270 Views   //   N°: 86

Chaque année, la famille Ralaivao fait le va-et-vient entre Ambositra et la région Alaotra, à 1 000 km de là. Sa mission, repiquer le riz selon les méthodes betsileo. Issue d’une longue lignée de « mpanetsa » (repiqueurs), son savoir-faire n’est certes pas piqué des hannetons…

Chaque année, Maurice Ralaivao, le père, Madeleine, sa femme, et ses quatre enfants (le plus petit âgé de 8 ans) partent pour l’Alaotra, à mille kilomètres de là, pour repiquer le riz. « Avant, on prenait une Peugeot 404 bâchée avec nos bagages dedans. Mais depuis quelques années, on peut se payer le minibus qui est quand même plus confortable », confie Maurice non sans fierté. En plus, ce n’est pas lui qui paie le transport, mais son contracteur dans l’Alaotra.

Les Betsileo sont réputés comme d’excellents riziculteurs. Leur parfaite maîtrise de la culture en terrasses et de l’irrigation des rizières en témoigne. Ils ont aussi recours à des techniques de repiquage du riz que les autres tribus de Madagascar maîtrisent mal. C’est ainsi que bien qu’originaire d’un tout petit village près d’Ambositra (270 km de Tana sur la nationale 7), la réputation des Ralaivao auprès des producteurs rizicoles s’étend jusque dans le Boeny à 2 000 km de là ! Toute la famille, comme plusieurs autres de ce village d’Ambositra, va rester dans l’Alaotra pendant toute la période du repiquage, soit environ deux mois. « Nous y retournerons aussi pour les moissons, une vraie vie de nomade », soupire Madeleine, la quarantaine.

Arrivé dans l’Alaotra, à part le petit dernier, tout le monde travaille. Ils ne sont pas payés à la surface repiquée mais par « sarak’antsaha » (littéralement, le temps passé au champ). Ils y descendent vers 4 heures du matin jusqu’à 14 heures avec une petite pause pour le repas du midi. Un sarak’antsaha, une journée au champ, est payée 4 000 ariary. « En un mois et demi, chacun empoche environ 150 000 ariary nets, voire plus. Le repas et la tasse de café du matin, c’est le propriétaire des champs qui nous les paie », explique Maurice le père.

Seule ombre au tableau, l’introduction et la vulgarisation de nouvelles techniques rizicoles. Les mpanetsa d’Ambositra voient ainsi leur côte baisser au profit de ces nouveaux procédés de repiquage. « Nos techniques traditionnelles betsileo comme le « ketsa tora-tady » (repiquage en ligne) ou le « ketsa saritaka » (en foule) n’ont pourtant rien à envier à ces nouvelles méthodes. En terme de productivité, il n’y a presque pas de différence », clame Maurice. « De toute façon, c’est la manière de s’occuper de la rizière jusqu’à la moisson qui conditionne la quantité de la récolte, rien ne peut remplacer l’élément humain », tonne-t-il. Avouez qu’il y a de quoi piquer une crise !

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