Journée mondiale de la langue maternelle : « Le Malgache ne respecte pas assez sa langue »
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La langue malgache n’a pas la place qu’elle mérite ni dans la vie économique de l’État ni dans l’éducation. Un paradoxe puisque près de 80 % des Malgaches sont monolingues !
Le 21 février est consacré à la Journée mondiale de la langue maternelle. La langue malgache vit puisque plus de 80 % des Malgaches l’utilisent dans leur vie quotidienne. Hélas, elle n’évolue pas parce qu’il n’y a pas de politique de vulgarisation de la langue qui permet l’introduction de nouveaux mots et de nouvelles expressions. Les dictionnaires existants ne sont pas mis à jour régulièrement pour permettre l’appropriation de nouveaux vocabulaires s’il en existe. Les évolutions ne seront pourtant pas visibles si elles ne sont pas fixées dans les écrits et vulgarisées pour le plus grand nombre.
Si l’on regarde la vie de tous les jours, on peut dire que le Malgache ne respecte pas assez sa langue. On a tendance à mélanger trop facilement le malgache et le français dans une conversation. A force, on ne maîtrise plus ni l’un ni l’autre. Il y a aussi trop de fautes dans des communications officielles en malgache au niveau de l’administration ou encore via les médias.
A cela s’ajoute des jeunes qui manquent de respect à la langue en utilisant les abréviations via les messages sur téléphone et les échanges sur les réseaux sociaux. Cela conduit la génération actuelle à maîtriser de moins en moins sa propre langue.
Cette langue a-t-elle réellement sa place dans la vie économique du pays et surtout dans l’éducation ? On dit souvent trop vite que nous n’avons pas assez de vocabulaires pour l’enseignement intégral en malgache. C’est totalement faux puisque l’Université Samis-Esic prouve qu’on peut enseigner en malgache jusqu’à l’Université. Et pour ce, il faut une véritable volonté politique. Si on veut que tous les Malgaches aient accès aux savoirs, aux connaissances, à leur culture et à leur histoire, il faut les diffuser en malgache. D’ailleurs, si l’on considère le faible niveau en français des enseignants, nous n’avons aucune alternative, il faut passer par le malgache. Tous les pays développés font l’enseignement dans leur langue et on devrait faire de même. Autre problème, cela fait dix ans qu’il n’y a plus assez de manuels scolaires en malgache dans les écoles publiques. Cela est préjudiciable à l’enseignement et c’est d’ailleurs vérifié par les faibles taux de réussite aux examens officiels.
Pour notre part, nous sommes dans l’édition et nous avons quand même constaté un éveil des consciences pour la lecture en malgache. Lors de la dernière Foire du livre, les parents recherchaient des livres en malgache pour leurs enfants. Dans cette dynamique, notre défi est de faire lire les enfants dans leur langue. Notre slogan est « Tiavo ny mamaky boky, tiavo ny teny malagasy » (aimez lire, aimez la langue malgache). Pour faire aimer la lecture, nous avons monté des activités d’animation lecture en malgache. Nous travaillons aussi avec les associations qui agissent auprès des enfants des familles défavorisées qui ne peuvent pas s’acheter des livres. Le manque de moyen ne doit pas être un frein à l’accès aux savoirs et aux connaissances.
Marie Michèle Razafintsalama
Editrice-fondatrice au sein des Editions Jeunes Malgaches
Créée en 2004, la maison Éditions Jeunes Malgaches édite des livres pour les enfants et pour les jeunes. A leur actif, une soixantaine de titres sur papier et une dizaine sur numérique en malgache et en français.
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