Herizo : « Je cavalais dès que je voyais un policier »
5 mai 2015 - DiasporaNo Comment   //   3337 Views   //   N°: 64

Herizo Andriamanantena, 42 ans, habite Vigneux-sur-Seine avec sa femme et ses deux enfants. Ce natif de Tana n’a pas toujours eu cette vie de famille paisible. Arrivé en France en 1998, sa situation n’a été régularisée qu’en 2003.  

Scolarisé dans une école privée de gestion, Herizo en sort sans diplôme et, pendant cinq ans, il est apprenti en mécanique auto avant de travailler avec son père comme « taxi-be ». Marié à 19 ans, il devient père de deux enfants mais sa « situation est instable ». Il décide alors de quitter le pays, avec un « visa de tourisme d’un mois », pour s’engager dans la Légion étrangère : « J’étais jeune et sportif, je croyais que c’était la seule issue. » Il a 21 ans quand il débarque à Paris, avec 15 euros en poche, sans trop savoir « où aller » : « Tout était beau mais tout était cher ! Trois jours après je voulais m’engager. » Mais sa grand-mère l’en dissuade : « J’avais un mois pour trouver quelque chose. » À l’expiration de son visa, il vit dans la clandestinité : « C’était une situation compliquée, je cavalais dès je voyais un policier. »

Un de ses « contacts » lui propose un job de babysitter : il s’occupe de « son enfant, Jérémie » et loge alors chez une tante puis, « gratuitement », au foyer malgache de Cachan, non loin de Paris, avant de dormir dans la « voiture d’un ami ». Sans papiers ni ressources ni domicile fixe, il vit au « jour le jour » pendant plus de cinq avant d’être embauché comme chauffeur-livreur par un Malgache. Un autre compatriote, « séparé de sa femme », l’héberge. Lors d’une beuverie entre amis, Herizo est « témoin » d’un drame effroyable : l’homme abuse « sexuellement » de « son enfant ». Face à l’insoutenable, Herizo réagit en « être humain » : il passe l’homme à tabac jusqu’à l’intervention de la police. Suite à un dépôt de plainte, Herizo tombe sous le coup d’un « arrêté d’expulsion » qui sera suspendu par son témoignage contre le pédophile, « condamné à la prison ferme ». Il peut alors régulariser sa situation administrative.

Depuis 2007, Herizo travaille dans la grande distribution dans les « vins et spiritueux ». Entré dans l’entreprise comme préparateur de commande, il est devenu chef de secteur puis chef d’équipe. Aujourd’hui, Herizo a reconstruit sa vie professionnelle et familiale. Remarié avec une Malgache, ensemble ils ont eu deux enfants, Jérémie (11 ans) et Pierre (presque 5 ans) : « On est une famille recomposée, c’est un peu difficile. » La vie ici « ce n’est pas du tout cuit, rien n’est donné, tout se paie, même pour aller faire pipi ! » Herizo rappelle souvent à ses enfants les mots de son père :
« C’est plus facile de s’asseoir sur un canapé que de s’asseoir par terre. »

Herizo sait qui il est : « Je suis Malgache, Madagascar est mon pays, j’aimerais bien y rentrer mais les enfants sont encore petits. Ici, on est habitués à un certain confort, l’école pour les enfants, la santé… »

– Et l’avenir ? « Dieu seul le sait. Je suis croyant, je suis chrétien, je laisse Dieu faire son oeuvre. »

Texte et photo : #ChristopheGallaire

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