François-Régis DURAND: Un moment tu ne contrôles plus
1 juillet 2013 - PortfolioNo Comment   //   2271 Views   //   N°: 42

Une enfance « renfermée » fait-elle les grands artistes ? Ne voyant ses parents que par intermittence « quatre à cinq jours tous les cinq à dix ans », sa grand-mère pour le sortir de son isolement lui offre ses premiers livres de photographie : déclic. Bac à poche, il choisit de passer les 25 années suivantes à l’usine, dont « 20 ans de nuit pour pouvoir photographier Paris le jour ». En 2003, suivant un oncle missionnaire à Madagascar, il découvre l’île. Et Pierrot Men et Franck Remy qui lui fait découvrir Ilakaka. Il remporte en 2010 le grand prix SFR Jeunes Talents photo.

Peu friand de discours, il voit la photo comme « une prise de parole indispensable, car il est indispensable de témoigner ». A la question d’un magazine qui lui demandait s’il se positionnait comme reporter ou artiste, il répond : « reporter de mes propres émotions ».

 ILAKAKA

 

« Cette image m’a été un peu imposée par les gens, les parents de la petite fille… Tout le monde voulait que je la prenne en photo… Devant ses hurlements j’étais hésitant… Il est évident que je ne peux photographier si cela engendre une douleur quelconque ! Quand j’ai ramené l’image à Ilakaka (là ou a été photographiée la pauvre malheureuse) Tout le monde en la voyant s’est esclaffé… Alors je suis retourné voir la petite fille et j’ai fait une autre image… Qu’elle ne garde pas qu’un mauvais souvenir du vazaha ! »

VERS MANAKARA

 


« Dans le train Fianarantsoa-Manakara… 12 heures dans une chaleur intense… j’en pouvais plus… J’ai du prendre des dizaines d’images. Le papa était vraiment très gentil… Je lui avais promis une photo… Mais de retour en France, je me suis aperçu que son adresse mal écrite était illisible… Si par bonheur il pouvait tomber sur cette image en lisant no comment, je serais le plus heureux des hommes… Je sais juste qu’il était professeur à Manakara… »

FIANAR

« Je ne sais plus comment ou pourquoi je suis rentré dans cette gargote, je me souviens juste de la lumière chaude d’une fin d’après-midi, d’un café pas mauvais, pour une fois, et du visage prévenant de la patronne sans doute étonnée de voir un vazaha prendre un café chez elle. Elle aura toujours ce visage bon et ce sourire un peu coquin chaque fois que je viendrais manger ici. Cette image a été prise à la volée sans réfléchir, puis instinctivement les images qui suivent sont mieux cadrées… Mais moins fortes ! Il y a un moment où l’on ne contrôle plus, et il faut qu’il en soit ainsi ; tout contrôler, c’est la mort ! Seule une part « d’erreur magique » peut vous faire basculer du bon côté ; c’est en cela que je ne crois pas aux photos trop posées qui ne laissent pas de place aux impondérables… »

Recueillis par #JoroAndrianasolo

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