Famadihana : La mort est une fête
6 juillet 2012 - TraditionsNo Comment   //   2591 Views   //   N°: 30

Comme chaque année, l’arrivée de l’hiver marque le retour des famadihana, les cérémonies du retournement des morts, à travers le pays. Un moment capital pour les familles, où les défunts intègrent enfin leur statut d’« ancêtres », intercesseurs entre les hommes et les Dieux. 

Les observateurs extérieurs traduisent couramment famadihana par « exhumation » ou « retournement des morts ». Ce qui n’est pas faux en soi, mais pour les Malgaches, cela signifie beaucoup plus que cela. Le famadihana est très exactement le rituel par lequel la dépouille d’un parent atteint le statut de razana, d’ancêtre.

« Un moment capital dans la spiritualité malgache, car tous les morts ne deviennent pas automatiquement des razana », explique Hemerson Andrianetrazafy, enseignant chercheur en civilisation à l’Université d’Antananarivo.

Une étape tellement importante pour les descendants qu’elle se prépare plusieurs années à l’avance. Pour cela, il convient de faire pas mal d’économies, ne serait-ce que pour acheter les porcs et les poulets qui entreront dans le vary be menaka (littéralement riz imbibé de graisse de porc), le plat spécial servi durant les famadihana. « Je compte abattre quatre porcs bien gras et des dizaines de poulets, en plus du riz et de l’alcool », explique Bernard Rakotomanampy qui prévoit d’organiser son famadihana à Ambatolampy les 24 et 25 août. Il y « exhumera » son frère aîné, ses parents ainsi que ses grands-parents. « L’hiver arrive et leur lamba est sûrement déchiré. Je dois m’occuper d’eux pour qu’ils ne prennent pas froid, comme eux se sont occupés de moi de leur vivant », précise-t-il. Pour les Malgaches, la mort n’est pas une dissolution, un anéantissement, mais une étape conduisant au statut d’ancêtre. « Tsy maty fa lasan-ko razana », dit-on, « Ils vivent mais sous une autre forme », servant d’intermédiaire entre les vivants et les zanahary, les divinités.

Le famadihana est donc l’occasion d’une immense fête visant à resserrer lien familial en mémoire des défunts. Contrairement aux autres événements familiaux, mariages, baptêmes, circoncisions, tout le monde se doit d’être présent, quitte à devoir traverser l’île ou prendre un avion depuis l’étranger. Tous les parents (havana), même ceux perdus de vue depuis des lustres, seront là. Tous sans exception. Et pour cause, les famadihana ne s’organisent en moyenne que tous les sept ans au sein d’une famille. « Ce serait un grand manque de respect envers les défunts que de ne pas y aller. Et puis c’est l’occasion de croiser de nouveaux parents », explique Bernard Rakotomanampy. Bref, la vie continue, si elle a jamais cessé.
 

#NjatoGeorges
Photo : Rijasolo

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