Zaitra an-tsena : Françoise de fil en aiguille
15 février 2012 - MétiersNo Comment   //   2095 Views   //   N°: 25

Au Pavillon Analakely, elle s’active tout le jour sur sa vieille Singer actionnée à la main. Françoise est une « zaitra an-tsena », une de ces « petites mains » des marchés, toujours prêtes à faire des miracles avec trois fois rien de tissu. Sans jamais perdre le fil, évidemment. 

De 9 heures du matin à la tombée du jour, elles s’alignent le long des trottoirs du Pavillon Analakely, comme au marché aux tissus d’Ambondin’Isotry ou d’Andravoahangy, avec leurs vieilles machines à coudre Singer, toujours actionnées à la main. Elles, ce sont les « petites mains » des marchés, fidèles au poste chaque jour de la semaine pour confectionner en un tournemain des draps, des rideaux, des langes pour bébés, des tabliers d’écoliers à moindre coût.

Ce travail, Fanomezantsoa Françoise l’exerce depuis une dizaine d’années. « J’accompagnai déjà ma mère au Pavillon. Elle était elle-même couturière et de fil en aiguille je m’y suis mise. » En une heure, elle peut coudre un tablier d’écolier pour

un prix variant entre 2 500 et 4 000 Ar selon la coupe. Dans les bons jours, elle peut espérer se faire jusqu’à 30 000 Ar. « J’attends les jours de fêtes ou les rentrées scolaires avec impatience, parce que c’est la période qui marche le mieux pour les couturières des marchés. » N’ayant suivi aucune formation en coupe et couture, Françoise ne peut réaliser de grands travaux comme la confection de vêtements à la mode ou le prêt-à-porter. En revanche, elle est souvent sollicitée pour les déguisements de Mardi Gras. Un métier qui lui permet bon an mal an de faire bouillir la marmite pour toute la famille.

Les zaitra an-tsena – les « couturières de marché » comme on les appelle, pour les différencier des couturières à domicile – sont réputées pour faire du mauvais ouvrage, un avis que ne partage pas Françoise. « Certaines couturières peuvent bâcler le travail pour avoir plus de commandes, mais ce n’est pas mon cas. Moi je suis une méticuleuse, j’aime le travail bien fait et c’est ce qui fait ma réputation sur le marché. » En dix ans de métier, elle a pu se constituer une clientèle fidèle, essentiellement des mères de familles qui lui passent de grosses commandes pour du linge de maison, des vêtements ou des pantalons à retailler. Pas besoin de publicité, tout se passe de bouche-à-oreille.

Solidaires, les petites mains peuvent se regrouper lorsque les commandes sont nombreuses ou s’entraider lorsqu’une machine fait des siennes, ce qui arrive souvent. « Nous travaillons sur des modèles manuels qui datent de nos mères ou grands-mères. Même les machines à machines à pédale nous sont interdites faute de courant », soupire Françoise. Sans manquer, malgré tout, de coeur à l’ouvrage.

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