Si jeunesse savait !
3 décembre 2015 - Fanahy gasyNo Comment   //   1452 Views   //   N°: 71

« Tanora ratsy fihary, antitra vao ratsy laoka » (jeune il n’a pas assuré son avenir, vieux il mange mal). Cet adage synthétise en peu de mots la leçon de toute une vie. Comme un écho tropical au terrible « Ah si jeunesse savait et si vieillesse pouvait ! » 

Dans ce proverbe qui nous vient des Anciens, il est question de l’insouciance de la jeunesse et des regrets de la vieillesse. A jeunesse oisive, vieillesse sans confort, prévient le moraliste qui n’est pas sans faire penser à un autre, très connu, des temps classiques : « Vous dansiez ? J’en suis fort aise, eh bien dansez maintenant ! » Eh oui, à trop faire la cigale, on en omet le travail abattu par l’austère fourmi pour constituer ses provisions d’hiver. Et quand arrivent les premiers frimas, nous voici « gros Jean comme devant » dit encore La Fontaine (Perrette et le pot au lait), puisque c’est de lui qu’il s’agit. Autrement dit le bec dans l’eau, la queue entre les jambes, pour filer jusqu’au bout la métaphore animalière.
 

Il est vrai qu’à 20 ans on n’a pas forcément conscience du temps qui passe, on voit la page blanche qu’il reste à écrire et on se dit que l’on a toute la vie devant soi. Mais le temps de compter quelques saisons, la page est écrite et ce sont les cheveux qui désormais sont blancs ! Faut-il donner raison à cet autre moraliste, ce ronchon de Corneille, quand il fait la leçon à sa belle Marquise ? « Marquise, si mon visage / A quelques traits un peu vieux / Souvenez-vous qu’à mon âge / Vous ne vaudrez guère mieux. » Ou au contraire applaudir aux vers insolents qu’a cru bon de rajouter Tristan Bernard, plus tard repris par Brassens : « Peut-être que je serai vieille / Répond Marquise, cependant / J’ai vingt-six ans mon vieux Corneille / Et je t’emmerde en attendant. » Le débat est ouvert !

Que choisir finalement : une jeunesse frivole, vécue dans l’insouciance ou une vieillesse frileuse au coin du feu avec le befitaika assuré ? Le romantisme des uns aura tendance à préférer le premier terme, le réalisme des autres, le second. A moins que la vérité ne soit, comme toujours, entre ces deux extrêmes. Et pour en finir avec les proverbes, celui-ci qui semble remonter à la nuit des temps : « Si jeunesse savait, si vieillesse pouvait ! » Autrement dit, si les jeunes avaient déjà de l’expérience et si les vieux avaient encore de la force, on friserait le monde parfait ! Mais c’est ainsi, la jeunesse sait et la vieillesse peut. La jeunesse sait que tout se paie, et la vieillesse peut tout payer…

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