Ronny Rengasamy :
8 janvier 2015 - CulturesNo Comment   //   2114 Views   //   N°: 60

Son roman « Les souffrances du jeune Kevin » paru aux éditions no comment® raconte le tour du monde d’un jeune Mauricien, dont Madagascar est la première étape. A 34 ans, Ronny Rengasamy commence à connaître les joies de l’écriture sans oublier les voyages qui nourrissent son imaginaire. 

Un livre entre fiction et réalité ?

C’est cent pour cent vrai et en même temps pas vrai du tout ! L’histoire se déroule à Madagascar et relate les deux ans que j’ai vécus à Tana. Je l’ai vue comme un puzzle, j’ai démonté toutes les pièces et j’ai reconstruit une autre histoire. C’est principalement inspiré de l’histoire d’Emilie, une jeune prostituée que j’ai rencontrée à Tana. Elle était barmaid, elle a perdu son boulot et doit recommencer à faire les boîtes, comme on dit ici. Un soir, elle raconte à un gars avec qui elle sortait ce qui s’est passé avec un client français qui n’a pas été correct avec elle. Une histoire bouleversante que je ne pouvais pas garder pour moi. C’a été le déclic vu que je ne pensais pas écrire un jour.. 

Pourquoi Madagascar ?
J’avais des copains qui étaient ici à l’époque. Moi, je voulais faire le tour du monde, c’est un rêve de gamin. Il y a des chemins qui se présentent et « on choisit de payer le prix », c’est ce qui est écrit sur la première page du livre. J’ai tout vendu chez moi à Maurice en mars 2007 pour venir vivre ici. Je suis venu à Madagascar en pensant que c’était la première étape de mon tour du monde. Finalement, j’y suis resté deux ans, j’ai perdu mes sous, mais j’ai gagné tellement plus que j’ai encore envie de tout perdre là…  

Ce sont tes premiers pas dans l’écriture ?
A Maurice, j’ai rejoint l’atelier d’écriture dirigé par Barlen Pyamootoo. Et de fil en aiguille, j’ai commencé à écrire. Il y a également Robert Furlong qui m’a présenté à une universitaire d’origine malgache qui vit en France, Dominique Ranaivoson. Franchement, je ne l’ai jamais rencontrée avant mais je pense que c’est la marraine du livre. Elle m’a beaucoup aidé dans mes démarches. Ma première nouvelle s’appelait justement Emilie, écrite à la troisième personne et publiée dans l’atelier d’écriture. Barlen Pyamootoo m’a poussé à en faire un roman mais malheureusement, à Maurice, les gens n’ont pas aimé. C’était peut-être trop choquant pour eux. J’ai fait d’autres textes comme Port-Louis qui m’a permis de remporter un petit concours régional en France. 

Un économiste devenu écrivain ?
Je ne suis pas littéraire. Je n’ai lu que 12 ou 15 livres avant de me mettre à écrire. Mais le processus d’écriture avait commencé avant même que je prenne conscience que j’écrivais. J’avais un carnet de voyages où je notais mes émotions et tout ce que je voyais. La ville de Tuléar m’a inspiré. Finalement, ça m’a donné matière à écrire et je pense que c’est ce que je suis venu chercher en arrivant à Madagascar. J’étais à la recherche de quelque chose – il n’y avait plus de doute, c’était l’écriture.  

Tu as découvert des auteurs également ?
Quand j’ai présenté mon premier manuscrit à des amis, ceux qui ont une culture plus vaste que la mienne m’ont parlé de Henry Miller. Il pensait que je lisais cet auteur et qu’il influençait mon écriture. Je ne le connaissais pas mais dès que j’ai lu un de ses ouvrages, ça m’a tout de suite plu. Il a un style cru, direct, il assume son statut de salaud au quotidien. Il raconte les coups bas qu’il fait à ses amis, à sa famille et à sa femme. Il y a aussi Gabriel Garcia Marquez, c’est simplement éblouissant. Egalement des auteurs américains comme Jim Harrison, l’écrivain haïtien René Depestre ou encore Amal Sewtohul, un écrivain mauricien et ami. Mais celui qui m’a donné le plus grand des frissons, c’est Yann Queffelec avec Les Noces Barbares. 

Ecriture, voyages…
En fait, c’est un ménage à trois : l’écriture, les voyages et moi. Ce sont trois ingrédients qui fonctionnent bien. J’ai compris que je ne voulais pas nécessairement devenir célèbre. Au début, tu commences à voir le coup médiatique. C’est vrai, je le vis comme un rêve en ce moment, mais ce n’est pas cet aspect de l’écriture qui m’intéresse. J’ai envie d’approfondir et de comprendre ma relation avec l’écriture. J’en suis là pour le moment. J’ai d’autres manuscrits dans les tiroirs, mais pour le moment, ça ne m’intéresse pas trop d’écrire pour publier. Je repars pour Le Cap en Afrique du Sud où j’ai acheté un voilier. J’apprends la navigation, j’ai mis toutes mes économies dedans. Je n’ai plus de sous, mais je suis heureux. J’ai hâte de terminer mon brevet de navigateur. Là, j’ai arrêté de préméditer les choses, j’ai arrêté de chercher. Je prends tout ce qui vient. Si l’écriture reprend, tant mieux, sinon, tant pis.

Propos recueillis par #AinaZoRaberanto 

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