Rola Gamana : Coup de bambou
3 février 2017 - CulturesNo Comment   //   1929 Views   //   N°: 85

L’instrumentarium de Rola Gamana est une véritable sonothèque naturelle. Toujours en quête de sonorités singulières avec son bois préféré le bambou, ou puisées dans les voix de la nature, ce poly-instrumentiste est devenu au fil du temps un pilier du patrimoine musical malgache.

Si on connaît Rola Gamana en tant que musicien et chanteur, il est avant tout un mélomane passionné de recherche. C’est ainsi qu’il crée ses propres instruments à vent, à cordes et à percussions. Il puise dans les ressources naturelles tant au niveau des matériaux (bois, coquillages, bambous, graines) que des bruits murmurés par la nature (chants d’oiseau, ruissellements, eaux de pluie). « Je suis né dans le village de Moratsiazo dans la région d’Itasy (Centre). Nous habitions près du lac et on nous appelait les zana-drano (enfants de l’eau). Depuis mon enfance, j’ai tissé un lien fort avec l’eau, la nature et la forêt. Un environnement qui, malheureusement se dégrade de jour en jour. »

Fils d’un musicien-luthier, il se familiarise à la fabrication d’instruments traditionnels dès l’âge de 8 ans. « Je me souviens de la fois où on s’amusait à construire un violon à partir d’épis de maïs et d’un bout de bois servant d’archet, ou encore lorsqu’on se servait de pirogue pour produire des sons de percussions. » S’inspirant de cette belle époque d’enfance, Rola Gamana décide de s’investir sérieusement dans la recherche musicale vers les années 1990. Ses études en physique et les nombreuses formations qu’il a faites en France à partir des années 2000 lui permettent aujourd’hui de maîtriser les différentes techniques liées au son. Dans son atelier, une pléthore d’instruments, toute une déclinaison de sonorités. « Ici, par exemple, l’oran-tavo fabriqué à partir d’une citrouille et de graines qui rappelle le son de la pluie. Il y a aussi un instrument d’accessoires fabriqué à partir de sabots de chèvres dont le frottement produit un son particulier. Ce qui me tient le plus à coeur c’est le ‘gama’, un instrument à percussion à quatre voix, fabriqué à partir de bambou ». Du jamais vu dans l’histoire du son à travers le monde.

Ses instruments traditionnels ont largement contribué à lancer sa carrière en tant qu’artiste complet. « A travers ma musique, j’ai combiné les sons des instruments fabriqués à du son de guitare qui reprend les traits musicaux traditionnels issus de différentes régions de Madagascar comme le bà-gasy et le vakodrazana (Hauts-Plateaux), le tsapiky (Sud), le salegy (Nord) et le basesa (Est). L’ensemble produit des airs folk et acoustic rythm’n’blues. » Une identité musicale qui l’a propulsé au rang des artistes malgaches de renom. Après quelques années d’absence de la scène acoustique traditionnelle malgache, le musicien a organisé un spectacle au village de la Francophonie en novembre dernier. Rola Gamana continue ses recherches sur le bambou et encourage la nouvelle génération à se tourner vers la création et non à suivre « bêtement la tendance ». Le bidouilleur de sons n’est pas prêt de prendre sa retraite.

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