Richard Falce : De haut en bas
2 juin 2014 - MusiquesNo Comment   //   2275 Views   //   N°: 53

Saint-Marien d’adoption depuis dix ans, il est une figure locale discrète, oeuvrant à la fois comme ingénieur du son et comme cinéaste. À son crédit, la comédie « Ambouni, Ambani » (haut, bas), un longmétrage en malgache débordant très largement des sentiers battus …

Richard Falce fait partie de cette génération d’artistes qui a su tout naturellement, à l’aube des années 90, s’approprier l’outil informatique. Non pas à des fins lucratives, mais bien comme un moyen de création aux possibilités infinies. « Je bidouillais à la sauvage des rythmiques et des gribouillages auditifs depuis le clavier de mon ordi », se souvient-il. Et très vite des groupes locaux s’appuient sur ses créations pour lancer leurs premiers textes dans la tonalité des musiques émergentes de l’époque : rap, reggae, dance-hall … Nous sommes au coeur du logiciel de la génération 2000.

Déjà la course aux hits s’accompagne à cette époque de clips. Richard Falce s’amuse donc de plus belle avec ses logiciels, débitant du son, du mix et de l’image de qualité. Quand il débarque à Sainte-Marie en 2004, il comprend tout de suite qu’il ne va pas chômer. Dans l’île et sur la côte Est, beaucoup de groupes locaux aspirent à avoir leur musique enregistrée sur CD pour booster leur promo. Richard met donc en boîte les projets et les ficelle d’un joli paquet cadeau. Fidel sera le premier artiste à se faire graver par ses soins, puis suivront Lily, la famille Tence Mena, Raoky, Golly de Tamatave, l’auteur Jean-Claude Rémy, le groupe Fafass et tout récemment Briskar pour un album reggae dont les bandes sons partiront à Paris pour le mastering final. C’est ainsi qu’est né le « Zion Studio » accueillant en enregistrement ou en résidence d’artistes ceux qui veulent goûter aux talents du jeune ingénieur du son, dans un cadre on ne peut plus idyllique.

Ses temps libres sont également consacrés à l’écriture d’un long-métrage. C’est Ambouni Ambani, dont le scénario est bouclé en 2013. « Avec ce film, je pose un tout petit grain de sable naïf et utopique dans la balance d’un monde où l’agressivité, la brutalité et la violence sont malheureusement la recette miracle pour les productions cinématographiques. » Avec un budget ridicule, il parvient à réaliser avec brio une comédie d’une heure et vingt-deux minutes. Simple et roborative à l’image de ses personnages : Saoutkou, Rosaline et Savouko, des broussards à l’humour irrésistible. Le pitch est lui aussi d’une sobriété heureuse : un campagnard qui doit travailler en ville et un citadin forcé de travailler la terre … le tout servi par des comédiens amateurs s’exprimant en malgache. Bref, on est loin des schémas formatés par l’industrie du cinéma.

Le film connaît en tout cas un vrai succès de bouche à oreilles, à Madagascar comme à l’étranger, malgré l’absence de promo. Comme toutes les oeuvres poussées en dehors des sentiers battus, le temps travaille pour lui. « Je réalise les petites idées que j’ai dans la tête », se contente de souligner Richard Falce, avançant sans pédaler sur son petit bonhomme de chemin. Tel un outsider en roue libre.

Philippe Bonaldi

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