Norbert Raharisoa : L’oublié de la fête
3 juin 2014 - TraditionsNo Comment   //   5869 Views   //   N°: 53

Cela fait 56 ans que « Ry Tanindrazanay Malala oh » rythme chaque 26 juin les fastes de la fête nationale. Norbert Raharisoa, le compositeur de l’hymne, a ceci de particulier qu’il est plus connu en Slovéquie que dans son propre pays. Et sans doute plus connu des philatélistes que des mélomanes…

En 1958, alors que la Grande Ile vient tout juste d’acquérir son indépendance, rares sont les Malgaches qui ne vibrent pas lorsque résonne le tout nouvel hymne national : « Ry Tanindrazanay malala o / Ry Madagasikara soa / Ny fitiavanay anao tsy miala, fa ho anao doria tokoa » ( Ô notre Patrie bien aimée / Notre beau pays, Madagascar / Notre amour pour toi / Reste et demeure à jamais). Si ces paroles sont sur toutes les lèvres, leur auteur, l’écrivain et pasteur Rahajason (1897- 1971), demeure un illustre inconnu. Tout comme Norbert Raharisoa, le compositeur. « Cinquante-six ans après, on ne peut que déplorer cette ignorance du public pour ces deux personnages qui ont tout de même écrit une page importante de notre histoire, tout au moins une partition », fait valoir un enseignant en Histoire de l’Université d’Ankatso souhaitant garder l’anonymat, qui s’est intéressé à leur biographie.

De Norbert Raharisoa, compositeur et pianiste, on sait finalement peu de choses, sinon qu’il est né en 1913 et décédé en 1963. Il aurait acquis une certaine renommée en Slovénie où il avait fait ses études et où ses oeuvres sont aujourd’hui plus jouées que dans son propre pays. « Il n’a jamais joui de son vivant de ses droits d’auteur, alors que ses compositions ont été et sont toujours interprétées par de grands artistes slovaques », souligne notre interlocuteur. Par exemple, par le compositeur Peter Breiner, auteur entre autres en 1993 d’un étonnant Beatles Go Baroque pour orchestre de chambre, ou encore par le Slovak Radio Symphony Orchestra.

Norbert Raharisoa a tout de l’artiste précoce. A 12 ans, il est initié au piano par des professeurs de l’école confessionnelle de la capitale où il est inscrit. Dans la foulée, il devient l’organiste de sa paroisse, assurant l’orgue tous les dimanches, et c’est ainsi que bien plus tard, le pasteur Rahajason pensera à faire appel à lui pour écrire la musique de l’hymne national. A en croire les mémoires du Prince Albert Rakoto Ratsimamanga (Madagascar: l’énigme de 1947), il s’agirait plus exactement d’un « ancien hymne » que son « ami » aurait « rénové », sans apporter plus de précisions.

Ce qui est certain, c’est que l’hymne de Norbert Raharisoa a été choisi à l’issue d’un concours organisé par Radio Madagasikara, la station nationale de l’époque. La petite histoire dit que c’est le cantique Zanahary ô, tahio ny tanindrazanay qui s’est retrouvé à la première place. « Malheureusement son auteur n’était pas du même parti que le futur président de la République Philibert Tsiranana. On a donc choisi le deuxième dans le classement, à savoir Norbert Raharisoa », explique l’historien. Le compositeur eut pourtant son heure de gloire posthume à Madagascar puisqu’en 1967, à l’occasion du quatrième anniversaire de sa mort, un timbre fut édité à son effigie. C’est ainsi qu’on écrit l’histoire.

Solofo Ranaivo

COMMENTAIRES
Identifiez-vous ou inscrivez-vous pour commenter.
[userpro template=login]