Mboutah : Au pied du mur
12 octobre 2017 - CulturesNo Comment   //   1464 Views   //   N°: 93

Face à l’abâtardissement général des genres, Mboutah (littéralement le mur) joue plus que jamais la carte de l’originalité. Un ingénieux fouillis artistique tout droit sorti d’Antsirabe, qui lui permet d’avoir son style bien à lui, générateur d’ambiance qui plus est !

Cela fait huit ans, précisément depuis leur spectacle « Izaho mbola mankafy » (Je suis encore fan), que les Mboutah n’avaient pas fait parler d’eux. On craignait le pire. Style disparus sans gilets de sauvetage dans la grande mer de la « merdiocrité » ambiante, tombés pour la bonne cause, mais tombés quand même. Et voilà qu’en juillet dernier, mine de rien, ils nous reviennent sur la scène de l’Is’art galerie, frais comme des gardons. Pas de la musique du monde, de la world comme on dit chez les ploucs subventionnés ou cherchant à l’être ! Non, le septette de choc des années 2000 composé de Zix, Toky, Dovs, Rivo, Bema, Junior et Cédric vaut bien mieux que ça ! Leur musique du monde à eux leur vient d’Antsirabe, plus précisément du tamboho (muret) près de l’hôpital d’Andranomadio où adolescents ils avaient l’habitude de se retrouver pour faire de la musique. C’est d’ailleurs de là qu’est tiré le nom du groupe Mboutah, Tamboho en verlan.

« On ne se revendique d’aucune ligne artistique », confie Zix. « On a toujours eu horreur des trucs standards. Ce qui nous rassemble depuis le début, c’est l’amour de la recherche, l’innovation. » Roots, jazz, rock, afro-beat, funk, reggae, tout est bon à prendre du moment que ça enrichit le son Mboutah qui, en définitive, ne relève d’aucun de ces genres. Un goût de l’expérimentation iconoclaste, joyeusement bordélique, qui n’est pas sans évoquer les Zappa ou Captain Beefheart de la grand époque ! Autant dire que toutes les notes sont permises et que la demi-mesure n’existe pas dans leur répertoire.

Tournés par goût vers l’underground, avec comme QG la scène Razaimamonjy, ils ont aussi pas mal appris au contact des Tôty, Silo ou Arison Vonjy. Il en a résulté deux albums marquants : Raomily (A l’image de la simple vie de Romule) en 2005 et Tsabo (Guérison) en 2007, et des passages très remarqués dans les festivals Donia, Angaredona ou Madajazzcar. Aomby lahy (Zébu mâle), Malahelo (Triste), Ny Hiranay (Notre chanson) sont des titres passés à la postérité. « Si au début nous faisions de la musique uniquement pour le plaisir de jouer entre nous, le temps a fait naître une complicité avec le public, et nous sommes toujours un peu étonnés que cela plaise aux gens. »

Les thèmes visent à valoriser les coutumes malgaches comme les pratiques rituelles avec le zébu, la circoncision ou encore les anciens jeux traditionnels. « Notre objectif est de créer de la valeur ajoutée à la malgachéité, enfin à notre manière, pas exactement comme des folkloristes. » Le groupe prévoit de réenregistrer son premier album Raomily avec une meilleure qualité sonore. Avec moins de fouillis ? On n’en est pas sûr. Insaisissables un jour, insaisissables toujours !

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