Majunga: Justin Kabosa
1 mai 2014 - MusiquesNo Comment   //   2794 Views   //   N°: 52

Entrez dans la transe

Entre deux voitures à retaper, Justin Kabosa trouve toujours le temps de troquer sa vieille blouse  contre l’habit d’apparat sakalava. Et sa bonne vieille clé de 10 contre une kabosy électrique, multipliant les riffs jusqu’à la transe.

A Mahajanga, sur la route d’Amborovy, quelques carcasses de voitures entourent un petit garage automobile.  Au milieu du bruit des meuleuses et des coups de marteau, on peut y entendre des bribes  de chants traditionnels sakalava quand, entre deux réparations (méthode système D),  Justin quitte la blouse et le cambouis pour s’adonner à sa passion. Ce garagiste de 34 ans, originaire de Vangaindrano, mène en effet une double vie : Docteur « clef de 10 » et Mister kabosy, il est tantôt mécanicien et tantôt fabriquant d’instruments. Egalement un auteur-compositeur connu sous le nom de Justin Kabosa.

Ce défenseur de la tradition mène sa révolution à coups de riffs acérés et de paroles engagées. Plus de 50 titres à son actif, dont 18 déjà enregistrés et un album en circulation.  Ses  clips sont visibles sur le net : on le voit vêtu du sobahia, l’habit  traditionnel des panjaka (roi ancestraux), avec sa kabosy électrique à sept cordes, véritable bijou de fabrication artisanale réalisé par ses soins dans un style mêlant futurisme, tradition et symbolisme ésotérique. Sa kabosy est sa fierté, elle le suit partout dans ses concerts, frappée de l’inscription Kasabo (pour Kabosy, Sakalava,  Boeny), en témoignage de l’amour qu’il porte à sa terre d’adoption.

C’est dans cette musique aux accents typiques que Justin puise son inspiration, abordant de sa voix douce et implorante des domaines aussi variés que l’environnement, les coutumes ancestrales, voire des interrogations très personnelles sur le statut de l’artiste.  Omeorano (Donnez de l’eau) est une chanson emblématique de son répertoire : des voix féminines répètent cette invocation jusqu’à la transe, suppliant les ancêtres d’apporter bénédiction et aide aux vivants. L’eau comme métaphore d’un avenir fertile pour la Grande Ile.

Dans les bars de Mahajanga où il se produit, ses compositions prennent souvent des allures de musique d’ambiance, mais dans une atmosphère désabusée. En attendant de trouver son public – un public à la hauteur de son talent -, c’est dans l’humilité et la patience qu’il navigue en direction d’un avenir meilleur. Là ou les voiles du talent peuvent se hisser. Là ou il y aura de l’eau…

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