Laurence Ink : « Tant ce pays est grand… »
4 juin 2015 - CulturesNo Comment   //   5151 Views   //   N°: 65

Écrivain et traductrice, Laurence Ink vit à Madagascar depuis 16 ans. Elle sort aux éditions no comment « Un Zébu léchant les pierres », un recueil de 13 nouvelles précédemment parues dans le magazine no comment. 

Comment est né ce livre ?
D’abord de ma rencontre avec Alexis Villain, le rédacteur en chef de no comment® à l’époque, qui m’a demandé de prendre en charge les pages Fictions du magazine. J’avais envie d’écrire ce type de textes, courts et denses, car je n’étais pas disponible pour un travail d’écriture de longue haleine. En même temps j’étais engagée dans un grand projet de construction d’hôtel à Belo sur Mer. En 15 ans d’expériences malgaches, j’avais accumulé, de mémoire ou par notes, de nombreuses histoires et anecdotes qui ne trouvaient leur place ni dans un roman ni dans le blog que je tenais depuis quelques mois et qui relatait cette aventure de construction d’hôtel.

Vos nouvelles démontrent une connaissance réelle du milieu malgache…
Je n’ai pas cherché à faire une démonstration de ma connaissance de la culture malgache ! J’ai simplement eu envie de partager ce que j’en sais, ce qu’en toutes ces années de pérégrinations dans la brousse, j’ai pu découvrir, comprendre , deviner… J’avais également envie de ne pas prendre pour cadre seulement Antananarivo ou les Hautes Terres, mais de donner à chaque histoire un cadre géographique différent. Car si Madagascar est bien un ensemble cohérent, une île homogène sur certains points de tradition, il y a une grande diversité des approches, des caractères. Ce qui n’est pas étonnant tant ce pays est grand.

Il est écrit sur la couverture : « Laurence Ink ne décrit pas un pays, ni un peuple : elle évoque une âme… »
J’aime ce mot d’âme, même s’il peut paraître un peu désuet. Ce que j’ai essayé de rendre dans ce livre, ainsi que dans mon roman Chants de corail et d’argent (Ed. Laffont, 2001), ce sont moins des faits, des histoires concrètes qu’une musique, qu’une émotion. Avant de venir à Madagascar, alors que j’étudiais le malgache aux Langues’O de Paris, j’entendais comme une mélodie étrange, que je ne savais pas saisir et encore moins décrypter, mais qui avait la magie des hainteny traduits par Jean Paulhan. Madagascar pour moi, la culture malgache, et la connaissance que j’en ai, relèvent davantage des sens, des émotions, des couleurs, que de la perception intellectuelle.

À quels lecteurs ces nouvelles sont-elles destinées ?
Je ne pense pas à un lecteur particulier lorsque j’écris. Dont j’attendrais telle ou telle attitude ou compréhension. J’ai simplement envie que de l’autre côté des mots que je trace, une perception, une émotion s’en empare en écho des miennes. Et dans le cas de ces nouvelles, le langage ne pouvait être que celui d’histoires qu’on raconte, le soir, à la veillée, susceptibles de se lire à haute voix, dites simplement parce que les sentiments que j’y évoque s’imposent. Même si j’ai tenté (c’est aussi le propre des nouvelles) de ne pas trop dire, de laisser la part du mystère, de l’ombre, à tous ces destins évoqués.

« Un Zébu léchant les pierres », par Laurence Ink,
No Comment Editions, 2015, 124 p. À commander chez l’éditeur. 

Propos recueillis par #SolofoRanaivo

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