La danse de la crécerelle par Panah Ranova
9 janvier 2015 - CulturesNo Comment   //   2189 Views   //   N°: 60

« Ny hitsikitsika tsy mandihindiky foana, fa ao raha » (La crécerelle ne danse pas pour rien, il y a quelque chose), fait valoir le bon sens populaire. Autrement dit, méfions-nous de l’eau qui dort. Elle peut cacher, comme la petite crécerelle, malgache bien des dangers… 

Notons d’abord que les Ntaolo (Anciens) ont choisi de faire appel à ce petit faucon (Falco newtoni), appelé aussi crécerelle malgache, pour illustrer cette vérité bien établie que dans la nature, il n’y a jamais d’effet sans cause. Alors ouvrons bien les yeux si l’on ne veut pas tomber… de haut. Ainsi, quand la petite crécerelle se met à « danser », plus exactement quand elle fait du surplace dans les airs tout en battant des ailes, c’est qu’elle a repéré une proie au sol (rat, reptile, insecte) et s’apprête à fondre sur elle avec la rapidité de l’éclair. C’est en somme le calme qui précède la tempête. Fins naturalistes, les Anciens avaient remarqué cette technique de chasse spécifique de la crécerelle, ce vol stationnaire appelé aussi « vol du Saint- Esprit »

par les ornithologues en souvenir de la colombe de l’Évangile. Comme suspendue à un fil, la crécerelle bat des ailes rapidement et scrute le sol en tournant sans cesse la tête à droite ou à gauche. Soudain elle plonge, ailes repliées le long du corps, puis elle déplie ses ailes, saisit sa proie entre ses serres et se réfugie dans un endroit tranquille pour la manger.
Ce mode de chasse caractéristique des faucons les distingue de la plupart des autres oiseaux prédateurs. Cette technique leur permet de repérer aisément leurs proies, comme depuis un poste d’observation en hauteur, même en l’absence d’arbre ou de point élevé. Si les Ntaolo ont choisi d’appeler danse ce petit manège, c’est qu’il n’est pas sans rappeler un style de danse malgache qui consiste à agiter les épaules, les bras et les mains, mais sans bouger les pieds ni avancer d’un pas. À noter encore que la danse de la crécerelle (Mandihiza rahitsikitsika) a donné une comptine très connue du répertoire traditionnel. Mais il est fort à parier que bon nombre d’entre nous, surtout les citadins, n’ont jamais vu cette danse de la crécerelle. D’ailleurs on voit de moins en moins de crécerelles, même dans les campagnes. Bien sûr, les hélicoptères pratiquent eux aussi le vol stationnaire, mais pas sûr qu’il soit aussi poétique que celui de la petite crécerelle….

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