Katro : Pourvu qu’on sème…
3 septembre 2015 - TraditionsNo Comment   //   4097 Views   //   N°: 68

Ce jeu de calcul à base de graines ou « semis » était très populaire aux époques anciennes. Largement tombé en désuétude face à la déferlante des jeux vidéo, il revient en force sous des formes étonnantes, dont une application mobile chez Microsoft ! 

À quoi pensez-vous si l’on vous dit katro ? Beaucoup de jeunes, notamment ceux qui vivent en ville, ne savent plus ce que c’est. Pourtant, c’était un des jeux de société préférés des Malgaches d’antan, aujourd’hui tombé dans les oubliettes,ou presque. Très populaire, il était plus pratiqué que le célèbre fanorona qui était plutôt réservé aux rois, reines et officiers du Royaume. « Contrairement au fanorona, on n’a pas besoin d’être grand stratège pour jouer au katro. Ce qui fait que même les enfants peuvent y jouer », explique Jean-Mari, vendeur d’objets artisanaux du côté de la route Digue.

D’origine africaine, le katro se joue à deux personnes sur un plateau à quatre rangées de trous (deux par joueur). Dans chaque trou il y a deux pions, et le jeu consiste, un peu comme le jeu de dames, à récupérer tous les pions de l’adversaire. Le plateau est traditionnellement en bois de palissandre, le plus souvent posé à même le sol, tandis que les pions ou « semis » sont des graines ou des cailloux. Pour effectuer un semis, le joueur choisit une case, prend les graines qui s’y trouvent, puis les sème dans les cases adjacentes, dans le sens contraire des aiguilles d’une montre. La partie se termine quand l’un des joueurs n’a plus de graines.

Quelles que soit ses variantes – katro gorobaka, katro mandry dia homana, ou katro tsotra – ce jeu de calcul, vieux de plusieurs millénaires selon les anthropologues, était une véritable école pour les Ntalao (Anciens malgaches). Ils y apprenaient notamment à gérer le budget du ménage et bien entendu la réserve à grains. À noter que contrairement aux échecs, il est difficile voire impossible de visualiser le déboulé de la partie, ce qui oblige les joueurs à avoir une très grande présence d’esprit, à réagir du tac au tac dès que l’opportunité se présente.

Aujourd’hui, ce jeu de calcul semble revenir en force, alors qu’il ne se pratiquait plus qu’en brousse et dans les endroits où l’on ne connaît pas – hélas ou heureusement – les jeux vidéo. Depuis quelques années, l’Alliance française tente de lui redonner vie en organisant annuellement un tournoi ouvert aux enfants et aux jeunes. Et signe des temps, en 2014, Adriela Ratefiarivony, un jeune informaticien malgache, a créé la première application mobile du katro sur Windows Phone, avec la bénédiction de Microsoft ! Et surprise, plus de 20 000 personnes vont le télécharger, du moins lorsqu’il était gratuit. Ce qui incitera le jeune prodige à le proposer à 0,99 euro, ce qui n’est pas non plus la fin du monde. Comme quoi, qui sème les bonnes applications, en récolte les fruits !

Souvent un bout de trottoir est ​le plateau de jeu des enfants.

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