Emmanuelle Andrianjafy : Déboussolée par Dakar
12 avril 2019 - DiasporaNo Comment   //   1699 Views   //   N°: 111

Résidant à Dakar, au Sénégal, depuis 2011, la photographe Emmanuelle Andrianjafy a appris à apprivoiser sa ville d’accueil à travers la photographie. Elle a sorti un livre intitulé Nothing’s In Vain qui a reçu plusieurs prix internationaux.

Pourquoi la photo ?
Avant de devenir photographe, j’ai travaillé dans l’industrie en France. En fait, ça m’est venu en 2013, quelques années après mon déménagement au Sénégal. J’ai été déboussolée par Dakar et mon envie (ou besoin) de photographier est née de là. Je savais prendre des photos à l’époque, mais c’est en participant à un atelier spécialisé, l’Atelier Smedsby, que j’ai appris à m’exprimer avec la lumière. J’ai donné mes premières expositions à la Fondation Aperture à New York en 2015 et au Addis Foto Fest, en Éthiopie, en 2016.

La reconnaissance arrive vite…
L’année suivante, mon projet intitulé Nothing’s in Vain a remporté le First Book Award, organisé par la maison d’édition londonienne Mack, et a été publié. Le lancement du livre et son exposition ont eu lieu lors du Photo London 2017. Le projet a remporté la même année le prix CAP Prize et a été finaliste du prix Aperture Portfolio Prize. J’ai par la suite exposé à l’Athens Photo Festival, pris part aux panels lors de Paris Photo et du Unseen Amsterdam. Récemment, Nothing’s in Vain a été retenu pour le LagosPhoto Festival au Nigéria, le Valongo Festival au Brésil, plus une exposition au New Art Exchange en Angleterre. Quelques médias se sont également intéressés à mon travail, entre autres, CNN, le British Journal of Photography, American Suburb X et aujourd’hui… No Comment !

Pour résumer Nothing’s In Vain …
Nothing’s in Vain ne raconte pas une histoire bien qu’il y ait un fil narratif. Il s’agit plutôt d’un ouvrage qui reflète des sentiments et des impressions dans un contexte spécifique. Le projet a débuté en 2014. Lorsque j’ai commencé, je ne savais pas quelle forme cela allait prendre au final, ni quand je le terminerais. Il s’agissait avant tout d’un besoin de photographier. Cela faisait quelques années que j’habitais à Dakar et je ne me sentais toujours pas à l’aise dans cette ville. J’ai utilisé la photographie pour affronter mon nouvel environnement. Fin 2016, j’avais terminé de photographier et le livre me semblait être la forme adéquate pour mon projet. J’ai donc fait une maquette que j’ai présentée au First Book Award. Cet ouvrage est le résultat de tout ce travail entrepris pour tenter de comprendre la ville, ce qui explique son titre. C’est aussi un clin d’oeil à l’album du même titre du chanteur sénégalais Youssou N’dour.

Comment voyez-vous Dakar comparée à Tana ?
Dakar est un immense chantier coincé entre la mer et le désert. Chaque jour, de nouveaux immeubles sortent de terre dans tous les quartiers, riches ou pauvres, populaires ou VIP. Il me semble que la ville ne parvient pas à contenir toute l’énergie qui circule dans ses rues. À certaines heures de la journée, tout cela se transforme en un immense mélange d’hommes, de béton, et de véhicules. C’est difficile à appréhender : il n’y a plus de place, ni pour l’ordre, ni pour la discipline. Cependant, en dépit de cet immense chaos, Dakar est une ville où l’on se sent en sécurité. Quelqu’un qui a vécu à Madagascar sentira directement les similarités entre les deux pays qui ont de nombreux points communs historiques, sociaux et culturels. Le fait d’être d’anciennes colonies françaises n’y est sans doute pas pour rien. De façon plus anthropologique, la famille, le riz et la religion tiennent une importance prépondérante dans la vie quotidienne des peuples de ces deux pays. Au final, je pense qu’ils ont plus de choses en commun que de différences.

La suite ?
Je travaille depuis plus d’un an sur un projet qui questionne ma relation à Madagascar en abordant, entre autres, les thèmes de la famille et de la société malgache.

Propos recueillis par #AinaZoRaberanto

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