Code secret
16 août 2016 - GaysyNo Comment   //   1734 Views   //   N°: 79

D’accord il faut vivre sa vie. Mais pour être heureux, vivons cachés, surtout si l’on est gay ! Ca limite les ragots. Donc, depuis le début de notre relation, avec mon mec, on s’est fait passer pour de super potes. Mais quand nous voyons des amoureux qui étalent leur bonheur en public, j’avoue que ça nous fait envie, parce qu’on s’aime comme eux.. Les rares moments où nous pouvons exprimer notre amour se passent entre quatre murs sans témoins, ou dans la nature loin des regards. Au fil du temps, nous avons même réussi à inventer des petits codes secrets pour exprimer l’amour que l’on se porte, même en public et sans que personne ne le sache.

Ça a commencé au tout début de notre relation. On s’est mis d’accord qu’un envoi d’un « rappelle-moi » par téléphone signifierait « je pense à toi ».

Et que si c’est envoyé deux fois successivement, c’est qu’il faut vraiment rappeler. Trois « rappelle-moi » successifs sont une invitation à se voir – à l’époque, on ne vivait pas ensemble. Un moyen efficace, en plus c’était gratuit. Quelques mois après ces premiers codes, il en a imaginé un autre, avec le geste cette fois. Il s’agit d’un étirement des mains, les yeux dans les yeux, qui veut dire simplement « je t’aime ». Il en a abusé de celui-là, c’était son préféré. Et personne ne s’en doutait ! On s’éclatait à en trouver autant qu’on voulait, du moment que c’était sincère. C’est ainsi que le geste de se caresser l’oreille était notre formule érotique, signifiant l’envie de faire l’amour. J’ai eu du mal à l’assimiler. Un soir, lors d’une sortie entre potes, il m’en a voulu de ne pas réagir au code.. Il m’a envoyé un texto me reprochant de ne pas vouloir comprendre ce qu’il était en train de me dire. Je l’ai regardé avec des yeux ronds, car je n’avais absolument pas fait le lien avec le fameux code, et il s’est emporté pour ça ! Depuis c’est ancré dans ma tête.

Dans notre petit monde à nous, chaque geste secret a sa signification. Au début, c’était un jeu et c’est devenu une obsession, une sorte de complicité entre lui et moi, d’en trouver de nouveaux. Mais là où on manque réellement d’imagination, c’est au moment des conflits. Eh oui, comme tout amoureux qui se respecte, notre relation passe parfois par la case dispute. Et entre deux hommes, croyez-moi, c’est spécial ! C’est là où la force du mâle entre en action. C’est chaud, souvent violent et très compliqué à gérer. Les gens s’imaginent mal une scène de ménage entre mecs. En général, les propos sont musclés pour le plus grand bonheur du voisinage. Alors comment faire pour exprimer sa colère sans les mots ? Quelle que soit son intensité, il faut éviter de s’emporter verbalement. Bien souvent, ça arrive là où il ne faudrait pas, lorsqu’il y a du monde autour… Donc, la première chose à faire est de se trouver un petit coin tranquille pour vider le l’abcès. Ce qui implique des mots neutres, gentiment menaçants, avec le sourire si possible !

Mais pourquoi ne pas écrire sa colère plutôt que de la hurler ? Au moins, ça ne s’entend pas ! Mais avec la pression qui monte, qui monte, difficile de ne pas gueuler un bon coup. Décidément, ce n’était pas efficace cette idée de dispute par lettres. Nous fûmes contraints de déménager par deux fois pour nos dérapages verbaux ! Il nous fallait trouver un autre moyen, mais lequel ?

Par la force du hasard, nous avons fait la connaissance d’une personne qui a un problème de langage, de naissance. Elle s’exprime par geste. Mon mec s’est alors intéressé à ce mode de communication jusqu’à l’apprendre sérieusement. Au bout de quelques semaines, il commençait à m’apprendre le peu qu’il savait.

Notre nouvelle connaissance était ravie de nous transmettre ce langage des signes. C’était enrichissant pour nous tous, surtout elle avait un point de vue captivant sur les gays ! Un soir, qu’il commençait à péter les plombs parce que j’avais reçu un appel téléphonique d’un inconnu, il se mit à me poser des questions dans le langage des signes. Et je lui répondis sur le même mode. Nos échanges furent tendus, violents mais sans un mot. Même le petit chat qui somnolait dans son panier ne se doutait pas qu’il assistait-là à un pugilat en règle.

Et s’il reste un code à inventer impérativement, c’est bien celui quand, on est gays, de se tenir la main dans la rue sans se toucher. Mon mec se fait fort d’en trouver un, un jour. Qui sait ?

par #Von

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